
Dans l’Humanité du 12 octobre, Daniel Davisse et Jean-Pierre Brard, vice-présidents du Syndicat des eaux d’Île de France (SEDIF) ont publié une mise au point qui pose plus de questions qu’elle n’apporte de réponses.
Si les tarifs "grande consommation" ne représentent qu’une part minime des ventes totales du SEDIF, pourquoi maintenir ce privilège anachronique accordé à quelques gros consommateurs d’eau ? La Communauté urbaine de Bordeaux (dont la distribution de l’eau à 210 000 abonnés est, comme celle du SEDIF, confiée à une entreprise privée) n’a pas de tarifs dégressifs pour les gros consommateurs, ni pour les consommateurs publics (mairie, hôpitaux, etc..), dans le contrat en vigueur depuis le 1er janvier 1992.
Il est à noter que les entreprises grosses consommatrices d’eau bénéficient déjà d’un autre avantage par rapport aux particuliers : la facture d’eau faisant partie de leurs charges, elle diminue donc d’autant leurs bénéfices et …leurs impôts ! Au final, pourquoi l’eau serait-elle quasiment gratuite pour les entreprises grosses consommatrices d’eau et au plein tarif pour les usagers domestiques ?
On peut également se demander pourquoi des maires de grandes communes populaires (respectivement Choisy-le-Roi et Montreuil sous Bois) défendent un système de gestion dont le premier bénéficiaire est la commune de Neuilly sur Seine (avec 36% de réduction de sa facture d’eau) ? Pourquoi défendent-ils un système de régie intéressée, dans lequel plus le volume d’eau consommée est important, plus Veolia engrange de bénéfices ? Pourquoi refuser de s’interroger sur la gestion du SEDIF quand le mensuel économique l’Expansion titrait en juillet : « le prix du mètre cube en eau trouble : à l’approche des municipales de 2008, les écarts de tarifs et de qualité de service entre villes incitent les élus à comparer la compétitivité des régies publiques et celle des géants privés du secteur » ? Pourquoi refuser de s’interroger sur la gestion du SEDIF quand le groupe politique (communiste) auquel appartiennent ces élus, a déposé cette année à l’Assemblée nationale une demande de « création d’une commission d’enquête chargée d’étudier l’impact des délégations de service public de l’eau sur les prix et la transparence du service rendu » ? Que croire, les discours à l’Assemblée nationale ou les actes de gestion au SEDIF? Pourquoi défendre bec et ongles le SEDIF, en faisant ainsi le sale boulot d’André Santini qui en est le président ?
Enfin les deux élus tentent de disqualifier l’ACME arguant « de sa méconnaissance des problèmes ». Soit, nous sommes de simples citoyens et usagers et nous avouons bien humblement notre ignorance. Mais des élus ne devraient-il pas d’abord se réjouir de l’intérêt manifesté par leurs concitoyens pour des problèmes réputés complexes ? Ne devraient-ils pas les éclairer pour ensemble assurer un meilleur contrôle sur un système dont l’opacité n’a d’égale que les dérives ?
Jean-Claude Oliva, président du Comité de Seine-Saint-Denis de l’Association pour le contrat mondial de l’eau (ACME)
Si les tarifs "grande consommation" ne représentent qu’une part minime des ventes totales du SEDIF, pourquoi maintenir ce privilège anachronique accordé à quelques gros consommateurs d’eau ? La Communauté urbaine de Bordeaux (dont la distribution de l’eau à 210 000 abonnés est, comme celle du SEDIF, confiée à une entreprise privée) n’a pas de tarifs dégressifs pour les gros consommateurs, ni pour les consommateurs publics (mairie, hôpitaux, etc..), dans le contrat en vigueur depuis le 1er janvier 1992.
Il est à noter que les entreprises grosses consommatrices d’eau bénéficient déjà d’un autre avantage par rapport aux particuliers : la facture d’eau faisant partie de leurs charges, elle diminue donc d’autant leurs bénéfices et …leurs impôts ! Au final, pourquoi l’eau serait-elle quasiment gratuite pour les entreprises grosses consommatrices d’eau et au plein tarif pour les usagers domestiques ?
On peut également se demander pourquoi des maires de grandes communes populaires (respectivement Choisy-le-Roi et Montreuil sous Bois) défendent un système de gestion dont le premier bénéficiaire est la commune de Neuilly sur Seine (avec 36% de réduction de sa facture d’eau) ? Pourquoi défendent-ils un système de régie intéressée, dans lequel plus le volume d’eau consommée est important, plus Veolia engrange de bénéfices ? Pourquoi refuser de s’interroger sur la gestion du SEDIF quand le mensuel économique l’Expansion titrait en juillet : « le prix du mètre cube en eau trouble : à l’approche des municipales de 2008, les écarts de tarifs et de qualité de service entre villes incitent les élus à comparer la compétitivité des régies publiques et celle des géants privés du secteur » ? Pourquoi refuser de s’interroger sur la gestion du SEDIF quand le groupe politique (communiste) auquel appartiennent ces élus, a déposé cette année à l’Assemblée nationale une demande de « création d’une commission d’enquête chargée d’étudier l’impact des délégations de service public de l’eau sur les prix et la transparence du service rendu » ? Que croire, les discours à l’Assemblée nationale ou les actes de gestion au SEDIF? Pourquoi défendre bec et ongles le SEDIF, en faisant ainsi le sale boulot d’André Santini qui en est le président ?
Enfin les deux élus tentent de disqualifier l’ACME arguant « de sa méconnaissance des problèmes ». Soit, nous sommes de simples citoyens et usagers et nous avouons bien humblement notre ignorance. Mais des élus ne devraient-il pas d’abord se réjouir de l’intérêt manifesté par leurs concitoyens pour des problèmes réputés complexes ? Ne devraient-ils pas les éclairer pour ensemble assurer un meilleur contrôle sur un système dont l’opacité n’a d’égale que les dérives ?
Jean-Claude Oliva, président du Comité de Seine-Saint-Denis de l’Association pour le contrat mondial de l’eau (ACME)
Dans la tribune libre de l'Humanité du 12 octobre 2006
Précision
Daniel Davisse et Jean-Pierre-Brard, vice-présidents du Syndicat des eaux d’Île-de-France, nous demandent de publier la mise au point suivante :
« Dans l’Humanité du 28 août 2006, vous avez publié une tribune du comité de Seine-Saint-Denis de l’Association pour le contrat mondial de l’eau, mettant notamment en cause le Syndicat des eaux d’Île-de-France (SEDIF), et plus particulièrement le tarif accordé aux communes en fonction du niveau de leur consommation, générateur, selon l’ACME, de gaspillage.
Le SEDIF s’étonne du crédit ainsi accordé à cette association, alors même qu’il n’a pas été invité à s’expliquer. Contrairement aux affirmations gratuites de l’ACME, les tarifs grande consommation ne constituent pas une incitation au gaspillage. Ses ventes ne représentent que 5,6 % des ventes totales et leur évolution diminue dans les mêmes proportions que celles du tarif général : en dix ans, de 1995 à 2005, ces dernières sont passées de 190 millions de m³/an à 166, enregistrant une baisse de 13 % ; celles du tarif communal de 18 à 15 millions de m³/an, soit une baisse de 16 %.
Il n’y a donc aucun "effet tarif" qui conduirait au gaspillage. Nous tenons à préciser que parmi les bénéficiaires du tarif grande consommation figurent également les bailleurs de logements sociaux.
Une fois encore l’ACME fait preuve de sa méconnaissance des problèmes. »
Daniel Davisse et Jean-Pierre-Brard, vice-présidents du Syndicat des eaux d’Île-de-France, nous demandent de publier la mise au point suivante :
« Dans l’Humanité du 28 août 2006, vous avez publié une tribune du comité de Seine-Saint-Denis de l’Association pour le contrat mondial de l’eau, mettant notamment en cause le Syndicat des eaux d’Île-de-France (SEDIF), et plus particulièrement le tarif accordé aux communes en fonction du niveau de leur consommation, générateur, selon l’ACME, de gaspillage.
Le SEDIF s’étonne du crédit ainsi accordé à cette association, alors même qu’il n’a pas été invité à s’expliquer. Contrairement aux affirmations gratuites de l’ACME, les tarifs grande consommation ne constituent pas une incitation au gaspillage. Ses ventes ne représentent que 5,6 % des ventes totales et leur évolution diminue dans les mêmes proportions que celles du tarif général : en dix ans, de 1995 à 2005, ces dernières sont passées de 190 millions de m³/an à 166, enregistrant une baisse de 13 % ; celles du tarif communal de 18 à 15 millions de m³/an, soit une baisse de 16 %.
Il n’y a donc aucun "effet tarif" qui conduirait au gaspillage. Nous tenons à préciser que parmi les bénéficiaires du tarif grande consommation figurent également les bailleurs de logements sociaux.
Une fois encore l’ACME fait preuve de sa méconnaissance des problèmes. »
tribune libre du 26 08 06: Le problème mondial de l’eau / Les gros clients laissent couler le robinet

JC Oliva
L’eau semble s’évaporer au fil des années et des conférences consacrées à ce sujet. La Semaine mondiale de l’eau qui vient de s’achever à Stockholm met l’accent, une fois de plus, sur la crise mondiale qui affecte cette ressource irremplaçable. Les pays riches ne sont pas à l’abri, souligne un rapport de WWF. « L’épisode de sécheresse que nous connaissons, le troisième en quatre ans, montre bien que la gestion de l’eau demeure un enjeu majeur dans le pays », explique Cyrille Deshayes, responsable eaux douces de WWF France. En région parisienne, selon le ministère de l’Écologie et du Développement durable, deux départements sont classés en « situation préoccupante », quatre en « situation délicate » et un en « situation de vigilance ».
Mais que faire ? Les appels à la responsabilité des citoyens se multiplient. Et les recommandations pleuvent : une petite douche plutôt qu’un grand bain... Tous les gestes écocitoyens sont bienvenus mais il faut maintenant que chacun assume ses responsabilités : on ne peut demander aux usagers domestiques de faire tous les efforts. Ce n’est pas seulement une question d’équité et de morale, c’est aussi une question d’efficacité : les usagers domestiques n’utilisent, au maximum, que 25 % de l’eau consommée dans notre pays. Il y a bien sûr un gros problème avec l’agriculture, qui commence à être reconnu. Mais sait-on que les plus gros consommateurs d’eau bénéficient de ristournes énormes ? C’est le cas par exemple avec le SEDIF (Syndicat des eaux d’Île-de-France qui regroupe 144 communes hors Paris) qui consent une réduction d’autant plus forte que le volume consommé est important. Cela va de 5 % de réduction pour un volume de 7 300 m3/an à 61 % pour un volume de 1 825 000 m3/an. À titre de comparaison, la consommation annuelle d’un couple avec deux enfants est estimée à 120 m3...
Ces ristournes bénéficient aux entreprises mais aussi aux communes (équipements municipaux, voirie...), la réduction étant « limitée » dans ce cas à 42 % pour un volume de 730 000 m3/an. Le taux de réduction appliqué par le SEDIF aux communes permet de repérer les plus grosses consommatrices d’eau. Neuilly-sur-Seine arrive en tête, en obtenant une réduction de 36 %. Issy-les-Moulineaux, dont le maire, André Santini, est président du SEDIF, obtient une réduction de 27 % ! Ces deux villes ne sont pourtant pas parmi les plus peuplées...
Ce système n’est pas viable d’un point de vue écologique car il constitue une puissante incitation au gaspillage de l’eau : si c’est pour payer plus cher en consommant moins, pourquoi se fatiguer à économiser l’eau ou à récolter l’eau de pluie comme cela se fait à grande échelle en Allemagne ? Il n’est pas viable non plus d’un point de vue social. Cela revient à faire passer une part supplémentaire du financement de l’eau du budget communal (qui provient notamment de l’impôt dont sont exonérés les plus bas revenus) au budget des ménages (par la facture d’eau payée par tous). Il y a là une forme de gratuité à l’envers qui est insupportable : une gratuité pour les plus riches ! L’ACME (Association pour le contrat mondial de l’eau) propose au contraire une tarification progressive : gratuité ou très bas tarif pour le minimum vital, tarif permettant d’amortir les coûts de production de l’eau pour un usage raisonnable, tarif dissuasif pour un usage insoutenable.
Maintenant que nous, les citoyens, commençons à être sérieusement responsabilisés sur la nécessité de préserver l’eau, il est grand temps de responsabiliser les responsables, politiques et économiques, de la gestion de l’eau.
Par Jean-Claude Oliva, président de l’Association pour le contrat mondial de l’eau, comité de Seine-Saint-Denis.
Mais que faire ? Les appels à la responsabilité des citoyens se multiplient. Et les recommandations pleuvent : une petite douche plutôt qu’un grand bain... Tous les gestes écocitoyens sont bienvenus mais il faut maintenant que chacun assume ses responsabilités : on ne peut demander aux usagers domestiques de faire tous les efforts. Ce n’est pas seulement une question d’équité et de morale, c’est aussi une question d’efficacité : les usagers domestiques n’utilisent, au maximum, que 25 % de l’eau consommée dans notre pays. Il y a bien sûr un gros problème avec l’agriculture, qui commence à être reconnu. Mais sait-on que les plus gros consommateurs d’eau bénéficient de ristournes énormes ? C’est le cas par exemple avec le SEDIF (Syndicat des eaux d’Île-de-France qui regroupe 144 communes hors Paris) qui consent une réduction d’autant plus forte que le volume consommé est important. Cela va de 5 % de réduction pour un volume de 7 300 m3/an à 61 % pour un volume de 1 825 000 m3/an. À titre de comparaison, la consommation annuelle d’un couple avec deux enfants est estimée à 120 m3...
Ces ristournes bénéficient aux entreprises mais aussi aux communes (équipements municipaux, voirie...), la réduction étant « limitée » dans ce cas à 42 % pour un volume de 730 000 m3/an. Le taux de réduction appliqué par le SEDIF aux communes permet de repérer les plus grosses consommatrices d’eau. Neuilly-sur-Seine arrive en tête, en obtenant une réduction de 36 %. Issy-les-Moulineaux, dont le maire, André Santini, est président du SEDIF, obtient une réduction de 27 % ! Ces deux villes ne sont pourtant pas parmi les plus peuplées...
Ce système n’est pas viable d’un point de vue écologique car il constitue une puissante incitation au gaspillage de l’eau : si c’est pour payer plus cher en consommant moins, pourquoi se fatiguer à économiser l’eau ou à récolter l’eau de pluie comme cela se fait à grande échelle en Allemagne ? Il n’est pas viable non plus d’un point de vue social. Cela revient à faire passer une part supplémentaire du financement de l’eau du budget communal (qui provient notamment de l’impôt dont sont exonérés les plus bas revenus) au budget des ménages (par la facture d’eau payée par tous). Il y a là une forme de gratuité à l’envers qui est insupportable : une gratuité pour les plus riches ! L’ACME (Association pour le contrat mondial de l’eau) propose au contraire une tarification progressive : gratuité ou très bas tarif pour le minimum vital, tarif permettant d’amortir les coûts de production de l’eau pour un usage raisonnable, tarif dissuasif pour un usage insoutenable.
Maintenant que nous, les citoyens, commençons à être sérieusement responsabilisés sur la nécessité de préserver l’eau, il est grand temps de responsabiliser les responsables, politiques et économiques, de la gestion de l’eau.
Par Jean-Claude Oliva, président de l’Association pour le contrat mondial de l’eau, comité de Seine-Saint-Denis.