Castres, le racket des usagers de l’eau ne passe pas

La Lyonnaise des eaux répercutait l’amortissement d’un droit d’entrée versé à la commune tarnaise sur les seuls usagers de l’eau. Une pratique courante, dénoncée récemment par le tribunal administratif de Toulouse.
Dans l’une de ses audiences, en octobre dernier, le tribunal administratif de Toulouse a jeté un sacré pavé dans la mare de la gestion de l’eau par les grandes compagnies privées. En décidant, sur plainte nominative de plusieurs habitants de la ville de Castres, d’annuler une délibération prise en décembre 1996 par le conseil municipal de la cité tarnaise concernant un avenant au contrat d’affermage de l’eau et de l’assainissement, les juges ont voulu dénoncer une pratique mise en place dans de nombreuses villes de France lors de la privatisation de ces services dans les années quatre-vingt-dix. Selon le tribunal, les tarifs imposés aux usagers par la société Lyonnaise des eaux dans cette localité " sont illégaux " depuis 1991. Elle considère notamment que " n’aurait pas du être répercutée sur les usagers une partie des charges d’amortissement de sommes antérieurement versées à la ville par le fermier pour couvrir des dépenses étrangères aux missions des services affermés et sans rapport direct avec les prestations fournies par ces derniers ".
Dans l’une de ses audiences, en octobre dernier, le tribunal administratif de Toulouse a jeté un sacré pavé dans la mare de la gestion de l’eau par les grandes compagnies privées. En décidant, sur plainte nominative de plusieurs habitants de la ville de Castres, d’annuler une délibération prise en décembre 1996 par le conseil municipal de la cité tarnaise concernant un avenant au contrat d’affermage de l’eau et de l’assainissement, les juges ont voulu dénoncer une pratique mise en place dans de nombreuses villes de France lors de la privatisation de ces services dans les années quatre-vingt-dix. Selon le tribunal, les tarifs imposés aux usagers par la société Lyonnaise des eaux dans cette localité " sont illégaux " depuis 1991. Elle considère notamment que " n’aurait pas du être répercutée sur les usagers une partie des charges d’amortissement de sommes antérieurement versées à la ville par le fermier pour couvrir des dépenses étrangères aux missions des services affermés et sans rapport direct avec les prestations fournies par ces derniers ".
Qu’en est-il plus précisément ?

Noël Legaré, vice-président du Comité de défense des usagers de l’eau et de l’assainissement de la commune de Castres (1), par ailleurs conseiller municipal communiste d’opposition au maire RPR au début des années quatre-vingt-dix, revient sur les raisons qui conduisirent dès ce moment des citoyens, des élus, des usagers à s’intéresser de plus près au contrat déléguant la gestion de l’eau et de l’assainissement à la Lyonnaise des eaux. " Je m’étais opposé à la privatisation, mais il aura fallu l’examen minutieux des textes et la persévérance de citoyens comme Paul Latgé, Georges Carceller, président du comité, Jean Bonnet ou Jean Maynadier, pour petit à petit mettre au jour les mécanismes de ce racket. "
Retour sur un processus. Lorsqu’en 1990 la gestion des services d’eau et d’assainissement est livrée à la Lyonnaise, cette dernière verse à la ville, en trois ans, 96 millions de francs à titre de droit d’entrée. Cette somme, qui transite immédiatement du budget de l’eau et de l’assainissement vers le budget général de la ville, n’a rien d’une subvention. Elle constitue, pour la Lyonnaise, un prêt accordé à la ville, au taux de 8,76 %, remboursable sur 30 ans (soit trois fois la mise - NDLR) par le budget de l’eau, donc par la facturation des seuls usagers. Interrogé en 1996 par la Dépêche du Midi, au moment où se renégociait le contrat avec la municipalité, le directeur régional de la compagnie privée, Michel Pujol, dévoilait le procédé. " C’est clair, ces 96 millions n’étaient pas un don, affirme-t-il. Nous sommes rémunérés pour le financement que nous avons apporté (...) Étant très endettées, les communes souhaitaient obtenir du financement et le faire payer par le budget de l’eau. " Tout en " garantissant " aux administrés de la commune, que la facture " ne sera pas augmentée ".
Retour sur un processus. Lorsqu’en 1990 la gestion des services d’eau et d’assainissement est livrée à la Lyonnaise, cette dernière verse à la ville, en trois ans, 96 millions de francs à titre de droit d’entrée. Cette somme, qui transite immédiatement du budget de l’eau et de l’assainissement vers le budget général de la ville, n’a rien d’une subvention. Elle constitue, pour la Lyonnaise, un prêt accordé à la ville, au taux de 8,76 %, remboursable sur 30 ans (soit trois fois la mise - NDLR) par le budget de l’eau, donc par la facturation des seuls usagers. Interrogé en 1996 par la Dépêche du Midi, au moment où se renégociait le contrat avec la municipalité, le directeur régional de la compagnie privée, Michel Pujol, dévoilait le procédé. " C’est clair, ces 96 millions n’étaient pas un don, affirme-t-il. Nous sommes rémunérés pour le financement que nous avons apporté (...) Étant très endettées, les communes souhaitaient obtenir du financement et le faire payer par le budget de l’eau. " Tout en " garantissant " aux administrés de la commune, que la facture " ne sera pas augmentée ".

Ce n’est pas comme contribuables qu’ils doivent rembourser la Lyonnaise, mais comme usagers des services d’eau et d’assainissement. Des services qui, par ailleurs, n’ont jamais bénéficié du prêt alloué par la compagnie de l’eau. Quand on sait que le budget principal d’une commune doit être équilibré par l’impôt, insiste Noël Legaré, ce détournement de pouvoir se traduit par un transfert partiel et dissimulé de l’impôt vers les usagers de l’eau et de l’assainissement. Un transfert particulièrement injuste, ajoute-t-il, vers des habitants âgés qui peuvent par ailleurs être exonérés d’impôts locaux. Le Comité de défense des usagers de l’eau et de l’assainissement de la commune de Castres se félicite d’autant plus de la décision positive du tribunal administratif de Toulouse que cette pratique semble en vigueur dans plusieurs grandes villes en France et quelles que soient les sociétés privées de gestion de l’eau. Des rendez-vous ont été pris avec le préfet du Tarn et le maire de Castres pour le mois de février. " Il ne peut être question de rester les deux pieds dans le même sabot, assure Noël Legaré, non seulement nous ne voulons plus rembourser ce prêt mais la Lyonnaise doit reverser les sommes que nous avons déjà payées. "
(1) Comité de défense des usagers. 18, rue Maxence-Audouar, 81100 Castres. Tél : 05 63 59 82 43.
(1) Comité de défense des usagers. 18, rue Maxence-Audouar, 81100 Castres. Tél : 05 63 59 82 43.