
Pour Jean-Luc Touly, président de l’association pour un Contrat mondial de l’eau (ACME), il n’y a pas de mystère ou presque : « quand trois entreprises privées, Véolia, Suez et pour une moindre part la Saure se partagent 80 % du marché de l’eau en France, il n’est pas étonnant que l’eau soit chère. » Et souvent plus chère. Ces marchés étant attribués pour de longues périodes, le consommateur devient captif de l’entreprise privée, qui lui apporte l’eau, mais aussi les factures. Résultat : il ne peut en changer individuellement.
Exemple en Île-de-France. Le SEDIF, syndicat qui regroupe 142 communes de banlieue, a délégué depuis 1923 la gestion de l’eau à la Compagnie générale des eaux, aujourd’hui Véolia. Premier contrat courant de 1923 à 1964, deuxième contrat de 1964 à 2010. De la très longue durée… Quel constat aujourd’hui ? 4 euros le mètre cube pour ces 140 communes. Pourquoi un tel prix ? D’autant que les élus sont nombreux à s’en plaindre aujourd’hui. Pour Jean-Luc Touly, il s’agit bien d’ « un manque total de transparence et même une volonté de complexifier » pour masquer la réalité des profits. Ainsi, toujours à propos de Véolia et du SEDIF, des syndicats du comité d’entreprise évoquaient il y a quelques années une possible surfacturation des charges de personnel : + 270 % sur les factures ! Interpellée sur ce sujet, la direction de Véolia refuse de répondre.
Autre exemple, qui a fait scandale il y a peu, celui des sommes prélevées sur les factures pour l’entretien des réseaux, dont 30 % sont réellement utilisées. À qui est destiné le reste de l’argent ? Plus récemment, quatre études successives de l’association de consommateurs Que choisir démontraient que sur 300 millions de facturations de Véolia, il était possible de faire 90 millions d’économie. L’entreprise a promis de porter plainte… Menace restée lettre morte. Et pour cause. Le - SEDIF, comme la loi l’y oblige à la veille du renouvellement du contrat (en 2010), a diligenté des audits. Leurs conclusions, rendues publiques le 25 septembre dernier, montrent une économie possible de 50 millions d’euros ! Au moins 90 millions pour Que choisir.
Ces chiffres montrent au moins deux choses : l’ampleur des profits réalisés et la possibilité de baisser le prix de l’eau. Ainsi, d’après les chiffres officiels de ces études, le prix de l’eau potable pourrait baisser de 10 centimes avec Véolia et de 25 centimes en régie publique. Cette distorsion entre le prix facturé et la réalité est telle qu’au moment où se pose la question du renouvellement, Véolia mais aussi Suez, qui se mettent sur les rangs, se disent désormais prêtes à des rabais…
(1) Incluant la production d’eau potable, l’assainissement des eaux usées et les taxes.
Max Staat
Exemple en Île-de-France. Le SEDIF, syndicat qui regroupe 142 communes de banlieue, a délégué depuis 1923 la gestion de l’eau à la Compagnie générale des eaux, aujourd’hui Véolia. Premier contrat courant de 1923 à 1964, deuxième contrat de 1964 à 2010. De la très longue durée… Quel constat aujourd’hui ? 4 euros le mètre cube pour ces 140 communes. Pourquoi un tel prix ? D’autant que les élus sont nombreux à s’en plaindre aujourd’hui. Pour Jean-Luc Touly, il s’agit bien d’ « un manque total de transparence et même une volonté de complexifier » pour masquer la réalité des profits. Ainsi, toujours à propos de Véolia et du SEDIF, des syndicats du comité d’entreprise évoquaient il y a quelques années une possible surfacturation des charges de personnel : + 270 % sur les factures ! Interpellée sur ce sujet, la direction de Véolia refuse de répondre.
Autre exemple, qui a fait scandale il y a peu, celui des sommes prélevées sur les factures pour l’entretien des réseaux, dont 30 % sont réellement utilisées. À qui est destiné le reste de l’argent ? Plus récemment, quatre études successives de l’association de consommateurs Que choisir démontraient que sur 300 millions de facturations de Véolia, il était possible de faire 90 millions d’économie. L’entreprise a promis de porter plainte… Menace restée lettre morte. Et pour cause. Le - SEDIF, comme la loi l’y oblige à la veille du renouvellement du contrat (en 2010), a diligenté des audits. Leurs conclusions, rendues publiques le 25 septembre dernier, montrent une économie possible de 50 millions d’euros ! Au moins 90 millions pour Que choisir.
Ces chiffres montrent au moins deux choses : l’ampleur des profits réalisés et la possibilité de baisser le prix de l’eau. Ainsi, d’après les chiffres officiels de ces études, le prix de l’eau potable pourrait baisser de 10 centimes avec Véolia et de 25 centimes en régie publique. Cette distorsion entre le prix facturé et la réalité est telle qu’au moment où se pose la question du renouvellement, Véolia mais aussi Suez, qui se mettent sur les rangs, se disent désormais prêtes à des rabais…
(1) Incluant la production d’eau potable, l’assainissement des eaux usées et les taxes.
Max Staat
L’eau municipale, un choix partagé
[Service public .]
La remunicipalisation de l’eau à Paris conforte les villes favorables au choix de la régie publique. Mais le Syndicat des eaux d’Île-de-France s’apprête à voter la régie au privé.
Paris a donc choisi la régie publique pour la gestion de son eau. Votée lors d’une séance du conseil lundi dernier 24 novembre, la délibération a fait l’objet d’un débat passionné, à la mesure d’un projet qui fait figure de symbole. S’il ne s’agit pas d’une décision subite (la majorité de gauche avait voté un voeu présenté par les élus communistes le 12 novembre 2007 et Bertrand Delanoë avait intégré le projet dans son programme pendant la campagne des municipales de mars 2008), le choix parisien fait déjà des vagues. D’abord au Syndicat des eaux d’Île-de-France (le SEDIF, le plus important syndicat de distribution de l’eau en France), qui regroupe 142 communes (4 millions d’utilisateurs) et doit renégocier avec Veolia son contrat qui arrive à échéance le 31 décembre 2010. Mais le choix de principe, gestion déléguée ou gestion directe, doit être pris lors de la réunion du comité le 11 décembre 2008.
Un mouvement se dessine dans l’opinion
Reconduire le contrat avec Veolia, lancer un nouvel appel d’offres ou opter pour une régie publique ? Un mouvement se dessine dans l’opinion pour une gestion directe par régie publique dans tout le pays, au vu des expériences positives engagées par plusieurs villes (Grenoble, Cherbourg, Rouen, etc.) et dans le désir partagé de transparence et d’une tarification au juste prix. Le SEDIF ne peut rester insensible et son président André Santini a souhaité prendre les devants. Il confirme son choix d’une délégation de service public, validé par le bureau du Syndicat, une délégation très différente de l’actuelle, avec un très large appel à la concurrence : « Le pouvoir de direction et de contrôle du SEDIF sera encore renforcé, le prix de l’eau diminué et une tarification sociale instaurée », écrit André Santini, qui par ailleurs raille « Paris la vertueuse » pour dénoncer le choix de Bertrand Delanoë d’une régie publique avant l’élection municipale. Il n’empêche, le vote du comité du 11 décembre n’est pas acquis d’avance : les 144 délégués dont 67 élus de gauche valideront-ils la délégation à une entreprise privée ? Le conseil municipal de Montreuil a souhaité un débat au grand jour en se prononçant jeudi soir pour le retour du SEDIF à une gestion publique. En regrettant qu’un seul scénario soit envisagé, le conseil demande un report du vote à six mois.
Les scandales d’une gestion et d’une tarification opaques, souvent dénoncés par les associations de consommateurs et d’usagers (l’analyse réalisée par la revue Que Choisir avait fait grand bruit en 2007) ont modifié la donne. Les débats deviennent de plus en plus âpres dans les agglomérations pour inciter les élus à mettre leur nez dans les comptes des sociétés privées qu’ils ont choisies pour gérer leur système de distribution d’eau. Et les résultats sont parfois spectaculaires. Dans le Grand Lyon, réputée jusqu’en 2007 comme l’une des plus chères de France, Veolia a été contrainte de baisser ses tarifs de 16 % à la suite de la révision quinquennale du contrat. À la Communauté urbaine de Bordeaux, la renégociation du contrat avec la Lyonnaise des eaux a fait baisser les tarifs de 10 %, tandis que l’entreprise s’engageait à doubler ses investissements. Le changement de majorité à Toulouse a aussi une incidence sur la gestion de l’eau. Le maire socialiste Pierre Cohen s’engage à abaisser le prix du mètre cube et il lance un audit - mais le contrat avec Veolia est valide jusqu’en 2 020. Difficile à dénoncer avant cette date, à moins de payer des amendes élevées.
Le maire (UMP) de Castres, qui a rompu un contrat avec la Lyonnaise des eaux, en sait quelque chose puisque la ville est en procès depuis 2004. À Neufchâteau, dans les Vosges, le maire socialiste avait rompu un contrat avec une filiale de Veolia et la commune a été condamnée le 31 décembre 2007 par le tribunal administratif de Nancy à verser 1,7 million d’euros à cette filiale. Une procédure en appel est en cours, et on ne sait rien des intentions du nouveau maire (UMP) de la ville qui ne souhaite pas communiquer sur ses intentions.
À Rouen, le souhait d’une régie publique
Les arcanes de la gestion de l’eau obligent parfois à des exercices complexes. L’agglomération de Rouen a décidé en 2005 la compétence eau, mais trois communes (Rouen, Darnétal et Grand-Quevilly) sont en régie directe et les 23 autres en délégation privée avec la Lyonnaise des eaux et Veolia. Comment mettre de l’ordre dans cet imbroglio qui se double de la volonté des élus normands de constituer une communauté urbaine ? La création d’un Observatoire de l’eau est, pour les élus communistes du Grand Rouen, une étape de la réflexion vers une régie publique commune. Il rendra un avis dans le courant du mois de décembre et la décision peut être prise au début du mois de janvier. L’affaire est encore compliquée par l’intégration dans la future communauté urbaine de la communauté d’agglomération d’Elbeuf, laquelle a fait le choix d’une régie publique ! « Les élus communistes souhaitent créer une grande régie publique de l’eau » dit Dominique Hardy, au nom du groupe au conseil de communauté.
La décision de transformer la communauté d’agglomération en communauté urbaine devrait être prise à la mi-janvier 2009. À cette occasion, les élus communistes sont décidés à mettre en avant cette revendication, « un point fort » pour le baptême de la nouvelle collectivité. « La décision peut être prise dès janvier », souligne Dominique Hardy, d’autant que Laurent Fabius, le président de l’actuelle communauté, y est favorable. Il semble en effet acquis qu’il n’y aura pas de renouvellement des délégations. Le mouvement pour une gestion publique de l’eau devient une lame de fond…
Eau. Repères
Bénéfice : 1,267 milliard d’euros.
Bénéfice : 89,1 millions d’euros.
La remunicipalisation de l’eau à Paris conforte les villes favorables au choix de la régie publique. Mais le Syndicat des eaux d’Île-de-France s’apprête à voter la régie au privé.
Paris a donc choisi la régie publique pour la gestion de son eau. Votée lors d’une séance du conseil lundi dernier 24 novembre, la délibération a fait l’objet d’un débat passionné, à la mesure d’un projet qui fait figure de symbole. S’il ne s’agit pas d’une décision subite (la majorité de gauche avait voté un voeu présenté par les élus communistes le 12 novembre 2007 et Bertrand Delanoë avait intégré le projet dans son programme pendant la campagne des municipales de mars 2008), le choix parisien fait déjà des vagues. D’abord au Syndicat des eaux d’Île-de-France (le SEDIF, le plus important syndicat de distribution de l’eau en France), qui regroupe 142 communes (4 millions d’utilisateurs) et doit renégocier avec Veolia son contrat qui arrive à échéance le 31 décembre 2010. Mais le choix de principe, gestion déléguée ou gestion directe, doit être pris lors de la réunion du comité le 11 décembre 2008.
Un mouvement se dessine dans l’opinion
Reconduire le contrat avec Veolia, lancer un nouvel appel d’offres ou opter pour une régie publique ? Un mouvement se dessine dans l’opinion pour une gestion directe par régie publique dans tout le pays, au vu des expériences positives engagées par plusieurs villes (Grenoble, Cherbourg, Rouen, etc.) et dans le désir partagé de transparence et d’une tarification au juste prix. Le SEDIF ne peut rester insensible et son président André Santini a souhaité prendre les devants. Il confirme son choix d’une délégation de service public, validé par le bureau du Syndicat, une délégation très différente de l’actuelle, avec un très large appel à la concurrence : « Le pouvoir de direction et de contrôle du SEDIF sera encore renforcé, le prix de l’eau diminué et une tarification sociale instaurée », écrit André Santini, qui par ailleurs raille « Paris la vertueuse » pour dénoncer le choix de Bertrand Delanoë d’une régie publique avant l’élection municipale. Il n’empêche, le vote du comité du 11 décembre n’est pas acquis d’avance : les 144 délégués dont 67 élus de gauche valideront-ils la délégation à une entreprise privée ? Le conseil municipal de Montreuil a souhaité un débat au grand jour en se prononçant jeudi soir pour le retour du SEDIF à une gestion publique. En regrettant qu’un seul scénario soit envisagé, le conseil demande un report du vote à six mois.
Les scandales d’une gestion et d’une tarification opaques, souvent dénoncés par les associations de consommateurs et d’usagers (l’analyse réalisée par la revue Que Choisir avait fait grand bruit en 2007) ont modifié la donne. Les débats deviennent de plus en plus âpres dans les agglomérations pour inciter les élus à mettre leur nez dans les comptes des sociétés privées qu’ils ont choisies pour gérer leur système de distribution d’eau. Et les résultats sont parfois spectaculaires. Dans le Grand Lyon, réputée jusqu’en 2007 comme l’une des plus chères de France, Veolia a été contrainte de baisser ses tarifs de 16 % à la suite de la révision quinquennale du contrat. À la Communauté urbaine de Bordeaux, la renégociation du contrat avec la Lyonnaise des eaux a fait baisser les tarifs de 10 %, tandis que l’entreprise s’engageait à doubler ses investissements. Le changement de majorité à Toulouse a aussi une incidence sur la gestion de l’eau. Le maire socialiste Pierre Cohen s’engage à abaisser le prix du mètre cube et il lance un audit - mais le contrat avec Veolia est valide jusqu’en 2 020. Difficile à dénoncer avant cette date, à moins de payer des amendes élevées.
Le maire (UMP) de Castres, qui a rompu un contrat avec la Lyonnaise des eaux, en sait quelque chose puisque la ville est en procès depuis 2004. À Neufchâteau, dans les Vosges, le maire socialiste avait rompu un contrat avec une filiale de Veolia et la commune a été condamnée le 31 décembre 2007 par le tribunal administratif de Nancy à verser 1,7 million d’euros à cette filiale. Une procédure en appel est en cours, et on ne sait rien des intentions du nouveau maire (UMP) de la ville qui ne souhaite pas communiquer sur ses intentions.
À Rouen, le souhait d’une régie publique
Les arcanes de la gestion de l’eau obligent parfois à des exercices complexes. L’agglomération de Rouen a décidé en 2005 la compétence eau, mais trois communes (Rouen, Darnétal et Grand-Quevilly) sont en régie directe et les 23 autres en délégation privée avec la Lyonnaise des eaux et Veolia. Comment mettre de l’ordre dans cet imbroglio qui se double de la volonté des élus normands de constituer une communauté urbaine ? La création d’un Observatoire de l’eau est, pour les élus communistes du Grand Rouen, une étape de la réflexion vers une régie publique commune. Il rendra un avis dans le courant du mois de décembre et la décision peut être prise au début du mois de janvier. L’affaire est encore compliquée par l’intégration dans la future communauté urbaine de la communauté d’agglomération d’Elbeuf, laquelle a fait le choix d’une régie publique ! « Les élus communistes souhaitent créer une grande régie publique de l’eau » dit Dominique Hardy, au nom du groupe au conseil de communauté.
La décision de transformer la communauté d’agglomération en communauté urbaine devrait être prise à la mi-janvier 2009. À cette occasion, les élus communistes sont décidés à mettre en avant cette revendication, « un point fort » pour le baptême de la nouvelle collectivité. « La décision peut être prise dès janvier », souligne Dominique Hardy, d’autant que Laurent Fabius, le président de l’actuelle communauté, y est favorable. Il semble en effet acquis qu’il n’y aura pas de renouvellement des délégations. Le mouvement pour une gestion publique de l’eau devient une lame de fond…
Eau. Repères
- - Veolia Eau (Anciennement Compagnie générale des eaux).
Bénéfice : 1,267 milliard d’euros.
- - Lyonnaise des eaux (groupe Suez).
Bénéfice : 89,1 millions d’euros.
La ville de Cherbourg savoure son eau publique
La commune tire un bilan positif de la remunicipalisation, depuis 2005, de ce service.
« Si c’était à refaire, nous le referions sans aucune hésitation. » Bernard Cazeneuve, maire (PS) de Cherbourg et président de la communauté urbaine de Cherbourg-Octeville dans la Manche, ne cache pas sa satisfaction. Trois ans après la remunicipalisation de l’eau, l’élu juge le bilan de cette décision « plus que positif ». « Le prix du mètre cube d’eau est aujourd’hui de 1,22 euro. À titre de comparaison, selon l’agence de l’eau Seine Normandie, le prix de l’eau, dans les communes du bassin où la gestion est déléguée au privé, était supérieur à ce prix de 22 centimes en 2006. » Le premier magistrat de Cherbourg est d’autant plus heureux de « cette performance » que, depuis la remunicipalisation, le prix n’a pas augmenté. Et ce malgré d’importants investissements. La régie communautaire a ainsi consacré 26 millions d’euros à la construction d’une nouvelle usine de production et engagera, d’ici à 2012, 45 millions d’euros dans la modernisation de deux stations d’épuration.
Le passage en régie communautaire de la totalité de la production, de la distribution et du traitement de l’eau est effectif depuis le 1er janvier 2005. Auparavant, la production et de la distribution d’eau de cette communauté urbaine, qui compte presque 100 000 habitants, était assurée respectivement à 70 % et 50 % par la Compagnie générale des eaux.
« En 1991, la municipalité de la Glacerie a rejoint la communauté urbaine. Pour son approvisionnement en eau, le choix s’est porté à l’époque sur la régie communautaire déjà existante. On peut considérer a posteriori que c’est à ce moment-là qu’a été franchie la première étape vers la reprise en main de la gestion de l’eau », se souvient Daniel Bosquet, vice-président (Verts) de la communauté urbaine en charge du dossier entre 1989 et 2007. Plus de dix ans ont donc été nécessaires avant que la CGE cède la place. « Un délai plutôt long » que l’élu explique par la complexité de l’opération. « Il a fallu d’abord surmonter les réticences. Beaucoup d’élus doutaient de la capacité d’une collectivité à gérer effectivement l’eau. Nous avons dû aussi affronter de solides pressions exercées par la CGE, peu enthousiaste à l’idée de perdre sa concession », explique l’élu. Mais la principale difficulté réside selon lui dans « l’acquisition des compétences nécessaires ». « Le fait qu’une partie de l’eau était déjà gérée en régie communautaire était un atout considérable mais insuffisant. Nous avons dû étoffer nos services et recruter des personnels qualifiés », détaille Daniel Bosquet. Pour l’élu, cette question constitue sans doute le principal obstacle à une gestion publique de l’eau. Les petites municipalités ou collectivités n’ont en effet par forcément les moyens de le surmonter.
Pierre-Henri Lab
« Si c’était à refaire, nous le referions sans aucune hésitation. » Bernard Cazeneuve, maire (PS) de Cherbourg et président de la communauté urbaine de Cherbourg-Octeville dans la Manche, ne cache pas sa satisfaction. Trois ans après la remunicipalisation de l’eau, l’élu juge le bilan de cette décision « plus que positif ». « Le prix du mètre cube d’eau est aujourd’hui de 1,22 euro. À titre de comparaison, selon l’agence de l’eau Seine Normandie, le prix de l’eau, dans les communes du bassin où la gestion est déléguée au privé, était supérieur à ce prix de 22 centimes en 2006. » Le premier magistrat de Cherbourg est d’autant plus heureux de « cette performance » que, depuis la remunicipalisation, le prix n’a pas augmenté. Et ce malgré d’importants investissements. La régie communautaire a ainsi consacré 26 millions d’euros à la construction d’une nouvelle usine de production et engagera, d’ici à 2012, 45 millions d’euros dans la modernisation de deux stations d’épuration.
Le passage en régie communautaire de la totalité de la production, de la distribution et du traitement de l’eau est effectif depuis le 1er janvier 2005. Auparavant, la production et de la distribution d’eau de cette communauté urbaine, qui compte presque 100 000 habitants, était assurée respectivement à 70 % et 50 % par la Compagnie générale des eaux.
« En 1991, la municipalité de la Glacerie a rejoint la communauté urbaine. Pour son approvisionnement en eau, le choix s’est porté à l’époque sur la régie communautaire déjà existante. On peut considérer a posteriori que c’est à ce moment-là qu’a été franchie la première étape vers la reprise en main de la gestion de l’eau », se souvient Daniel Bosquet, vice-président (Verts) de la communauté urbaine en charge du dossier entre 1989 et 2007. Plus de dix ans ont donc été nécessaires avant que la CGE cède la place. « Un délai plutôt long » que l’élu explique par la complexité de l’opération. « Il a fallu d’abord surmonter les réticences. Beaucoup d’élus doutaient de la capacité d’une collectivité à gérer effectivement l’eau. Nous avons dû aussi affronter de solides pressions exercées par la CGE, peu enthousiaste à l’idée de perdre sa concession », explique l’élu. Mais la principale difficulté réside selon lui dans « l’acquisition des compétences nécessaires ». « Le fait qu’une partie de l’eau était déjà gérée en régie communautaire était un atout considérable mais insuffisant. Nous avons dû étoffer nos services et recruter des personnels qualifiés », détaille Daniel Bosquet. Pour l’élu, cette question constitue sans doute le principal obstacle à une gestion publique de l’eau. Les petites municipalités ou collectivités n’ont en effet par forcément les moyens de le surmonter.
Pierre-Henri Lab