Le Rajasthan : Etat Citoyen

Photos
...Le Rajasthan, dévasté par la sécheresse, pâtit depuis des années du manque d'eau. Cette année, le Rajasthan Patrika, le plus ancien quotidien local, qui est aussi celui qui bénéficie du plus fort tirage, est parvenu à inciter près de 150 000 personnes à nettoyer bénévolement 385 bassins, puits et réservoirs hors d'usage afin que ces infrastructures soient prêtes à recueillir les prochaines pluies. Et, fin septembre, lorsque la pluie est effectivement arrivée, le niveau d'eau a commencé à monter. Après des décennies d'inertie, les bawris (puits à marches) et autres installations peuvent à nouveau recevoir le précieux liquide .
Si l'anecdote est enthousiasmante, c'est qu'elle montre que les individus peuvent prendre l'initiative sans tout attendre du gouvernement. Tout est parti de la direction du Rajasthan Patrika, qui fête cette année ses cinquante ans : le journal avait en effet lancé une campagne quotidienne, intitulée « Amritham Jalam » [L'eau est un nectar], pour inciter ses lecteurs à aller nettoyer tous les systèmes traditionnels de collecte d'eau laissés à l'abandon. Une quasi-révolution de l'eau s'est alors mise en marche.
...Le Rajasthan, dévasté par la sécheresse, pâtit depuis des années du manque d'eau. Cette année, le Rajasthan Patrika, le plus ancien quotidien local, qui est aussi celui qui bénéficie du plus fort tirage, est parvenu à inciter près de 150 000 personnes à nettoyer bénévolement 385 bassins, puits et réservoirs hors d'usage afin que ces infrastructures soient prêtes à recueillir les prochaines pluies. Et, fin septembre, lorsque la pluie est effectivement arrivée, le niveau d'eau a commencé à monter. Après des décennies d'inertie, les bawris (puits à marches) et autres installations peuvent à nouveau recevoir le précieux liquide .
Si l'anecdote est enthousiasmante, c'est qu'elle montre que les individus peuvent prendre l'initiative sans tout attendre du gouvernement. Tout est parti de la direction du Rajasthan Patrika, qui fête cette année ses cinquante ans : le journal avait en effet lancé une campagne quotidienne, intitulée « Amritham Jalam » [L'eau est un nectar], pour inciter ses lecteurs à aller nettoyer tous les systèmes traditionnels de collecte d'eau laissés à l'abandon. Une quasi-révolution de l'eau s'est alors mise en marche.
Le traditionnel au secours du modernisme

Il y a plusieurs siècles de cela, les souverains de cet État princier ont créé tout un système de constructions destinées à collecter et à stocker les eaux de pluie afin de les utiliser toute l'année. Cela contribuait du même coup au renouvellement des nappes phréatiques. Mais, après l'indépendance (en 1947), avec la généralisation de l'eau courante, ces moyens traditionnels ont progressivement perdu du terrain.
Pour ne rien arranger, le gouvernement a fait creuser des milliers de puits busés. C'est ainsi que les réservoirs traditionnels ont progressivement été abandonnés et sont devenus des ruines remplies d'eaux stagnantes et polluées – il a fallu vingt-cinq remorques pour transporter les 10 mètres de vase et d'eaux stagnantes polluées accumulées au fond d'un réservoir. L'abandon de ces méthodes de collecte et de stockage dans certaines régions, notamment Jaisalmer et Jaipur, s'est traduit par un tarissement des nappes phréatiques, dont le niveau descend de 1,50 m à 3 m chaque année. Or les bawris du Rajasthan sont de véritables merveilles architecturales. Les maharajas avaient chargé de leur construction les meilleurs artisans. Ces bassins, qui font partie du patrimoine de l'État princier, ont entre 150 ans et 1 000 ans.
Pour ne rien arranger, le gouvernement a fait creuser des milliers de puits busés. C'est ainsi que les réservoirs traditionnels ont progressivement été abandonnés et sont devenus des ruines remplies d'eaux stagnantes et polluées – il a fallu vingt-cinq remorques pour transporter les 10 mètres de vase et d'eaux stagnantes polluées accumulées au fond d'un réservoir. L'abandon de ces méthodes de collecte et de stockage dans certaines régions, notamment Jaisalmer et Jaipur, s'est traduit par un tarissement des nappes phréatiques, dont le niveau descend de 1,50 m à 3 m chaque année. Or les bawris du Rajasthan sont de véritables merveilles architecturales. Les maharajas avaient chargé de leur construction les meilleurs artisans. Ces bassins, qui font partie du patrimoine de l'État princier, ont entre 150 ans et 1 000 ans.
Des tentatives de récupération politique

Le journal Rajasthan Patrika ne s'attendait pas à ce que sa campagne remporte un tel succès. Pas moins de 146 000 volontaires se sont mis au travail, effectuant 438 942 heures de travail – une main-d’œuvre qui aurait coûté 50 millions de roupies (environ 930 000 Euros) aux pouvoirs publics.
Les hommes politiques n'ont pas tardé à voir l'intérêt de s'engager dans cette nouvelle cause populaire et ils ont été nombreux à dépasser les antagonismes partisans pour mettre la main à la pâte. Sukumar Verma, rédacteur en chef adjoint du quotidien, explique : « Cette campagne a fait naître un nouvel esprit chez les gens. Aux prochaines élections, il ne fait aucun doute que ces questions seront posées sur la gestion de l'eau. Les politiciens n'ont pas le choix : ils doivent se joindre au mouvement et montrer leur soutien. »
Car des problèmes épineux se sont fait jour. À Jaipur, le nettoyage par des bénévoles du bassin historique de Talkatora, symbole de la culture et du patrimoine de la « ville rose », a révélé des faits pour le moins dérangeants : construit par des souverains du passé, ce bassin était alimenté par de nombreux conduits de collecte des eaux de pluie, dont on a découvert qu'ils avaient été détournés par de riches propriéaires. Il s'agit désormais de retrouver ces conduits et de les remettre en service, malgré les dérivations pratiquées.
Les hommes politiques n'ont pas tardé à voir l'intérêt de s'engager dans cette nouvelle cause populaire et ils ont été nombreux à dépasser les antagonismes partisans pour mettre la main à la pâte. Sukumar Verma, rédacteur en chef adjoint du quotidien, explique : « Cette campagne a fait naître un nouvel esprit chez les gens. Aux prochaines élections, il ne fait aucun doute que ces questions seront posées sur la gestion de l'eau. Les politiciens n'ont pas le choix : ils doivent se joindre au mouvement et montrer leur soutien. »
Car des problèmes épineux se sont fait jour. À Jaipur, le nettoyage par des bénévoles du bassin historique de Talkatora, symbole de la culture et du patrimoine de la « ville rose », a révélé des faits pour le moins dérangeants : construit par des souverains du passé, ce bassin était alimenté par de nombreux conduits de collecte des eaux de pluie, dont on a découvert qu'ils avaient été détournés par de riches propriéaires. Il s'agit désormais de retrouver ces conduits et de les remettre en service, malgré les dérivations pratiquées.
L'eau une ressource en danger

Le Rajasthan est depuis toujours une contrée aride. Le plus vaste État de la fédération indienne, qui couvre 342 000 km2, soit 10,4 % du pays, ne bénéficie que de 1,4 % des ressources en eau. Sans compter que la pluviométrie est faible. Dans certaines régions désertiques, notamment autour de Barmer et de Bikaner, il n'est pas rare qu'un enfant de 4 ans n'ait jamais vu la pluie. Sur une année, cette région ne reçoit en moyenne que 20 centimètres de pluie, qui tombent en quinze jours. Il s'agit désormais d'en collecter le plus possible et de stocker pour faire face aux besoins durant toute l'année. Cela a tout l'air d'une gageure. Pourtant, dans des villes situées en plein désert, comme Jaisalmer, les familles récupèrent traditionnellement la moindre goutte de pluie tombée sur leur toit et aux alentours, et utilisent tout au long de l'année l'eau ainsi collectée.
Comme le Rajasthan Patrika le rappelle à ses lecteurs, d'autres États sont concernés. L'eau est une ressource en danger sur tout le territoire indien. Notre planète contient 1,4 milliard de kilomètres cubes d'eau, mais l'eau douce ne représente que 2,7 % de ce volume. Et les nappes phréatiques ne représentent que 22,6 % de l'eau douce.
Pour Gulam Kothari, rédacteur en chef du quotidien, « l'eau est la seule richesse que nous pouvons léguer aux générations futures ». Si la tendance lancée par son journal se confirme, le Rajasthan saura se montrer à la hauteur de cette ambition.
Ramesh Menon Tehelka
Photos
Lectorat
Avec ses éditions locales et ses suppléments, le quotidien Rajasthan Patrika affirmait, en l'an 2000, être lu par 10 millions d'Indiens.
Comme le Rajasthan Patrika le rappelle à ses lecteurs, d'autres États sont concernés. L'eau est une ressource en danger sur tout le territoire indien. Notre planète contient 1,4 milliard de kilomètres cubes d'eau, mais l'eau douce ne représente que 2,7 % de ce volume. Et les nappes phréatiques ne représentent que 22,6 % de l'eau douce.
Pour Gulam Kothari, rédacteur en chef du quotidien, « l'eau est la seule richesse que nous pouvons léguer aux générations futures ». Si la tendance lancée par son journal se confirme, le Rajasthan saura se montrer à la hauteur de cette ambition.
Ramesh Menon Tehelka
Photos
Lectorat
Avec ses éditions locales et ses suppléments, le quotidien Rajasthan Patrika affirmait, en l'an 2000, être lu par 10 millions d'Indiens.