Des précédents à cette décision

Déjà en mai 1995, le tribunal d’instance de Saint-Brieuc, saisi par "37 citoyens-consommateurs" de Trégueux (22), avait condamné la Compagnie Générale des Eaux pour avoir délivré de l’eau contenant plus de 50mg/l de nitrates.
En décembre de la même année, il avait aussi condamné la Lyonnaise des eaux de Guingamp à indemniser 176 consommateurs de Guingamp pour la délivrance d’une eau trop polluée. La société s’étant retournée contre l’état, le tribunal administratif de rennes condamnait celui-ci à verser une indemnité de 751 440 francs au distributeur (voir le jugement)
Une action qui fait tache d’huile
Denis Baulier, militant associatif de Penvénan (22), décidait à son tour d’effectuer des rétentions sur ses factures d’eau dans le cadre de l’opération "nénuphar". Une première action en justice contre le syndicat d’eau qui l’alimentait restait sans succès mais la cour d’appel de Rennes lui donnait finalement raison et condamnait le syndicat à lui verser une indemnité de 7 548 € correspondant à l’achat d’eau en bouteille pour sa famille pendant la période concernée.
L’Etat à nouveau condamné.
Le syndicat d’adduction d’eau du Trégor, suivant l’exemple de la Lyonnaise de Guingamp, portait donc plainte contre l’Etat pour n’avoir pas su préserver la ressource en eau. En condamnant l’Etat à verser 15 609 € au syndicat les juges retenaient deux fautes :
Les carences dans l’instruction des dossiers et le contrôle des installations classées agricoles. En effet le cheptel porcin avait augmenté de 28% de 1998 à 2000 alors que le secteur était déjà classé en zone d’excédent structurel, c’est-à-dire interdit à toute extension.
Le retard à la transcription, dans le droit français, des directives communautaires relatives à l’eau de consommation.
Les magistrat ont donc retenu 1 484 jours d’eau "non-conforme" et fixé l’indemnité à 5 609 € et y ont ajouté 10 000 € au titre de l’atteinte à l’image du syndicat et 1 000 € de frais de procédure.
Et toujours le scandale du "pollué-payeur".
Car l’état condamné, ce sont en réalité les contribuables amenés à payer aux entreprises de distribution d’eau les sommes reversées aux consommateurs plaignants et les amendes versées aux distributeurs pour "atteinte à leur image de marque".
En toute logique il ne devrait rester à l’Etat que le choix de sanctionner à son tour les pollueurs.
Mais inutile de rappeler le refus permanent des élus et ministres de droite d’inscrire la taxation des nitrates dans la loi. Inutile aussi de rappeler que les consommateurs domestiques paient 85% des redevances contre moins de 1% pour les agriculteurs responsables de plus des2/3 de la pollution.
Bientôt la France sera peut-être à nouveau condamnée par la Cour de Justice européenne mais quel sens donner à une condamnation qui touche les victimes et non pas les responsables ?