un article de bakchich.info

jeudi 11 octobre 2007 par La princesse enchantée
Avril 2001. Le représentant français d’une obscure société immatriculée au registre du commerce de Rabat sous le numéro 53527 – L’Euro Africaine des Eaux – prend sa plume pour écrire au gouverneur de la province d’Ifrane. Il lui demande la concession « d’un terrain d’une superficie d’environ trois hectares, situé dans la Commune rurale de Ben Smim, propriété de la Jemaa de Zaouia Ben Smim ». Son projet est ambitieux : exploiter la source de Ben Smim en construisant une unité de conditionnement d’eau qui, grâce à « un processus original », permettra de commercialiser de l’eau en bouteille « à des prix réduits sur l’ensemble du territoire. » Une aubaine pour le Maroc dont une bonne partie de la population rurale est privée d’eau potable. Si en plus l’Euro Africaine affirme qu’elle créera près de 200 emplois… Inutile de préciser qu’elle a vite obtenu les autorisations nécessaires à la construction de son usine dont les travaux devaient démarrer au plus vite. C’était sans compter sur la coriacité des 3 000 et quelques habitants de Ben Smim qui vivent de cultures maraîchères et de l’élevage d’ovins. Emmenés par un conseiller municipal, Moulay Ahmed Guenoun, ils crient au vol de « leur » eau.
Il faut dire que la vie est dure dans les campagnes. On y souffre de la sècheresse et Ben Smim n’y échappe pas : entre 1986 et 2000, le débit moyen de sa source a chuté de 30 %. Alors les paysans manifestent, contactent les médias, les réseaux altermondialistes… La bataille dure cinq bonnes années. La sauce finit par prendre, leur message tourne sur Internet. Impossible pour les autorités marocaines de fermer les yeux et d’ignorer les frondeurs de Ben Smim. Leur leader est reçu à Rabat par le Premier ministre de l’époque, Driss Jettou. Selon lui, il s’entendra dire que son agitation risque de « créer un problème entre États et que l’ambassade de France au Maroc faisait des problèmes ». Aujourd’hui, Moulay Ahmed Guenoun n’hésite pas à reconnaître qu’il a eu « les gens de l’ambassade au téléphone qui lui ont demandé pourquoi [il] organisait toutes ces manifestations ». Tiens donc, pour quelle raison, diable, la vénérable ambassade s’agiterait-elle pour défendre une mystérieuse société marocaine qui ne semble avoir de français que la nationalité de son représentant au royaume ? Moulay Ahmed Guenoun tourne autour du pot mais concède à demi-mot : « il y a un gros groupe européen derrière ». Ce qui signifierait que l’Euro Africaine des Eaux ne serait qu’une société écran… Toujours est-il qu’avec l’aide d’un nouveau gouverneur de la province d’Ifrane un accord a été conclu avec une partie des habitants de Ben Smim, en mars 2007. Selon Moulay Ahmed Guenoun, l’Euro Africaine s’est engagée à embaucher et former des paysans de Ben Smim ainsi qu’à sponsoriser quelques associations culturelles. Une goutte d’eau pour cette société qui compte investir 60 millions de dirhams dans son usine.
Dans les beaux sièges parisiens des grands groupes, on qualifie cette aimable charité de « gestion des communautés locales ». La paix n’est pas pour autant revenue à Ben Smim puisqu’une partie de la population continue de protester. Le 13 septembre dernier, des manifestants ont fêté le début du Ramadan en se battant avec les forces de l’ordre. Résultat : 6 personnes auraient été arrêtées et une trentaine seraient poursuivies en justice. Pendant ce temps, les travaux de construction de l’usine de L’Euro Africaine ont débuté la semaine dernière
Avril 2001. Le représentant français d’une obscure société immatriculée au registre du commerce de Rabat sous le numéro 53527 – L’Euro Africaine des Eaux – prend sa plume pour écrire au gouverneur de la province d’Ifrane. Il lui demande la concession « d’un terrain d’une superficie d’environ trois hectares, situé dans la Commune rurale de Ben Smim, propriété de la Jemaa de Zaouia Ben Smim ». Son projet est ambitieux : exploiter la source de Ben Smim en construisant une unité de conditionnement d’eau qui, grâce à « un processus original », permettra de commercialiser de l’eau en bouteille « à des prix réduits sur l’ensemble du territoire. » Une aubaine pour le Maroc dont une bonne partie de la population rurale est privée d’eau potable. Si en plus l’Euro Africaine affirme qu’elle créera près de 200 emplois… Inutile de préciser qu’elle a vite obtenu les autorisations nécessaires à la construction de son usine dont les travaux devaient démarrer au plus vite. C’était sans compter sur la coriacité des 3 000 et quelques habitants de Ben Smim qui vivent de cultures maraîchères et de l’élevage d’ovins. Emmenés par un conseiller municipal, Moulay Ahmed Guenoun, ils crient au vol de « leur » eau.
Il faut dire que la vie est dure dans les campagnes. On y souffre de la sècheresse et Ben Smim n’y échappe pas : entre 1986 et 2000, le débit moyen de sa source a chuté de 30 %. Alors les paysans manifestent, contactent les médias, les réseaux altermondialistes… La bataille dure cinq bonnes années. La sauce finit par prendre, leur message tourne sur Internet. Impossible pour les autorités marocaines de fermer les yeux et d’ignorer les frondeurs de Ben Smim. Leur leader est reçu à Rabat par le Premier ministre de l’époque, Driss Jettou. Selon lui, il s’entendra dire que son agitation risque de « créer un problème entre États et que l’ambassade de France au Maroc faisait des problèmes ». Aujourd’hui, Moulay Ahmed Guenoun n’hésite pas à reconnaître qu’il a eu « les gens de l’ambassade au téléphone qui lui ont demandé pourquoi [il] organisait toutes ces manifestations ». Tiens donc, pour quelle raison, diable, la vénérable ambassade s’agiterait-elle pour défendre une mystérieuse société marocaine qui ne semble avoir de français que la nationalité de son représentant au royaume ? Moulay Ahmed Guenoun tourne autour du pot mais concède à demi-mot : « il y a un gros groupe européen derrière ». Ce qui signifierait que l’Euro Africaine des Eaux ne serait qu’une société écran… Toujours est-il qu’avec l’aide d’un nouveau gouverneur de la province d’Ifrane un accord a été conclu avec une partie des habitants de Ben Smim, en mars 2007. Selon Moulay Ahmed Guenoun, l’Euro Africaine s’est engagée à embaucher et former des paysans de Ben Smim ainsi qu’à sponsoriser quelques associations culturelles. Une goutte d’eau pour cette société qui compte investir 60 millions de dirhams dans son usine.
Dans les beaux sièges parisiens des grands groupes, on qualifie cette aimable charité de « gestion des communautés locales ». La paix n’est pas pour autant revenue à Ben Smim puisqu’une partie de la population continue de protester. Le 13 septembre dernier, des manifestants ont fêté le début du Ramadan en se battant avec les forces de l’ordre. Résultat : 6 personnes auraient été arrêtées et une trentaine seraient poursuivies en justice. Pendant ce temps, les travaux de construction de l’usine de L’Euro Africaine ont débuté la semaine dernière