L'Uruguay a donc fêté l'Octobre bleu, pour commémorer ce vote historique. Cette année, une marche pour les biens communs et contre les privatisations a traversé le pays du Nord au Sud pour proclamer le droit à la terre, à l'eau et au logement. En 2006 le groupe français Suez (à travers Aguas de Barcelona) et le groupe espagnol Aguas de Bilbao ont ainsi du renoncer à des contrats d e privatisation des ressou rces hydriques du pays, en application de la réforme constitutionnelle.
L'Octobre bleu est aussi célébré ailleurs en Amérique latine. En Colombie la campagne pour le droit à l'eau continue, avec des activités éducatives dans tout le pays, qui sera suivie en novembre d'une navigation sur les fleuves de l'Amazonie colombienne. Un des objectifs de la campagne est d'obtenir un référendum sur le droit à l'eau.
En Bolivie la Fondation Solon organisera une série d'événements pour discuter de deux thèmes principaux : l'utilisation de l'eau dans le cadre de productions d'agrocarburants et l'impact social et environnemental des grands barrages. C'est qu'en Bolivie on se souvient encore de la « guerre de l'eau » survenue en 2000 à Cochabamba, ou Bechtel avait comme allié stratégique le groupe italien Edison, ce qui permit la création de la société Aguas de l Tunari, laquelle s'adjugea (sans concurrents) la gestion des services d'eau et d'assainissement de la ville. Une révolte populaire la mit en fuite. Quelques années plus tard, Suez est parti à sont tour d' El Alto.
A Santiago du Chili a eu lieu une marche contre le projet d'extraction minière de la société canadienne Barrick Gold, dans la localité de Pascua Lama, à la frontière avec l'Argentine. Les travaux d'extraction ont déjà endommagé un glacier andin et risquent aussi de contaminer les vallées environnantes dans les deux pays. Au Chili, les ressources hydriques sont presque entièrement entre les mains de privés.
L'Octobre bleu se célèbre aussi en Amérique du Nord, en Afrique, en Inde et dans le Sud-Est asiatique et en Europe. Un de ses thèmes-clé est la lutte contre la privatisation de la gestion des ressources en eau. Une lutte dans laquelle l' Italie est aussi pleinement engagée.
Selon Tony Clarke, du Polaris Institute canadien et auteur, avec Maude Barlow, de Oro Azul (Or bleu), «le principal obstacle à la reconnaissance du droit humain à l'eau est sa privatisation ».
La Mexicaine Silvia Ribeiro (chercheuse du Groupe international ETC , réseau pour al défense de la diversité sociale et écologique) explique que la privatisation a plusieurs facettes : la privatisation du territoire, la création de mégaprojets comme les barrages, la présence d'industries polluantes, la privatisation des services d'eau potable et la mise en bouteille. Pour les institutions financières internationales (Banque mondiale et Fond Monétaire International), qui ont soutenu pendant des années la privatisation de l' eau, l'objectif principal aujourd'hui est de favoriser la création d'associations entre secteur public et privé. Dans le cas de l'Uruguay, la Banque mondiale a déclaré : « les tentatives de privatisation d'entreprises (publiques) se sont heurtées à l'opposition de la population. Il a donc été décidé d'ouvrir progressivement le marché à la concurrence entre public et privé. » C'est là désormais une stratégie globale.
Mais les mouvements pour le droit à l'eau critiquent aussi l'association public-privé, dans la mesure où dans ce cas de figure, l'eau continue à être gérée comme une source de profit et non comme un droit inaliénable. Selon les Nations unies, 10 000 personnes meurent chaque jour pour avoir bu de l'eau de mauvaise qualité. Un drame qui pourrait être évité par la construction de réseaux d'adduction d'eau, d'égouts et d'installations de traitement des eaux usagées adéquats.
NdT : Les Amis de la terre d' Uruguay viennent de publier une carte interactive sur la présence des transnationales de l'eau en Amérique latine. À consulter
Source : il manifesto
Article original publié le 2 novembre 2007
Fausto Giudice est membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d'en respecter l'intégrité et d'en mentionner l'auteur, le traducteur, le réviseur et la source.
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