Energie du Mali, Les défis d’une reprise en main de l’Etat
L'Etat reprend la main
[1 Novembre 2005
C.A. DIA
Kinshasa
Après le retrait du groupe Saur international, l'Etat malien redevient l'actionnaire majoritaire avec 66 % des parts du capital. Dès lors, on attend de changement dans le fonctionnement de l'entreprise. Ce changement dans la composition de l'actionnariat intervient au moment où Edm Sa. doit faire face à un certain nombre de défis, notamment la satisfaction de la demande pressante et de l'entretien du réseau illustrés par les coupures d'électricité ces derniers temps.
C'est une nouvelle page qui vient de s'ouvrir dans la vie de la société Energie du Mali. Le groupe Saur International, filiale de l'entreprise Bouygues, a décidé de se retirer du capital de la société. La décision a été entérinée par un Conseil d'administration de l'entreprise tenu vendredi dernier. Du coup, l'Etat redevient actionnaire majoritaire d'Edm. Ce qui implique naturellement un changement dans le schéma de fonctionnement de l'entreprise. Avec son nouveau statut, l'Etat récupère le droit de nommer le directeur général de la société. Il n'a pas tardé à l'exercer et a pioché à l'interne pour porter à la tête de l'entreprise Sékou Alpha Djiteye, l'ancien directeur national de l'eau.
BASCULEMENT DE L'ACTIONNARIAT
Cinq ans après la mise en concession de la société, le partenaire stratégique, Saur international vient donc de jeter l'éponge pour, dit-on, au niveau de la société, «une différence de vision économique». «Il ne s'agit pas d'un changement dans la forme du contrat de concession, mais tout simplement d'un changement d'actionnariat», explique un responsable de la société.
Rappelons que la concession donnait la majorité des actions au partenaire stratégique que formaient Saur International et Industrial Promotion Services pour l'Afrique de l'ouest du groupe Aga Khan, avec 60%. L'Etat était minoritaire avec 40%. En décidant de se retirer du contrat, Saur International a rétrocédé sa part de 39% des actions à Ips. Ce dernier a à son tour passé le paquet à l'Etat qui se retrouve désormais avec 66% des actions contre 34% pour Ips, l'actionnaire minoritaire.
Ce basculement de l'actionnariat impose une modification de la composition du conseil d'administration. C'est, en effet, le principal actionnaire qui nomme 4 des 6 membres du conseil d'administration. Les administrateurs, à leur tour, élisent un président. Pour le moment, on en est pas encore là. L'heure est plutôt aux interprétations sur les raisons du retrait de Saur. De sources proches de la société, on indique qu'il s'agit d'une différence de vision et d'approche économique. «Après quelques années d'exploitation, le groupe n'a pas trouvé intéressant le marché malien qui ne représente même pas 1% de son chiffre d'affaire», dit-on.
Mais la pression du gouvernement pour la baisse des tarifs d'eau et d'électricité n'est certainement pas étrangère à la décision de Saur. Les négociations qui étaient en cours depuis de longs mois à Washington sous la médiation de la Banque mondiale n'auront donc pas abouti. Pourtant, officiellement, le passage de la concession à l'affermage semblait acquis. Si la concession imposait à Saur la charge des importants investissements que le développement de l'électrification du pays nécessite (une part du contrat que le concessionnaire est loin d'avoir rempli), l'affermage reporte le plus gros de ces investissements sur l'État, en tablant sur la capacité de celui-ci de pouvoir lever des fonds à des conditions plus douces que celles du marché.
Cet accord de principe n'a malheureusement pas épuisé un contentieux alourdi par de profonds désaccords sur la structure du prix du courant électrique. La question est d'importance dans un contexte économique et social qui presse les pouvoirs publics de faire baisser la facture d'électricité autant des particuliers que des entreprises. Saur ne voulait pas en entendre parler, arguant du surcoût engendré par la production thermique de l'électricité alimentant de nombreuses villes du pays. Le concessionnaire s'appuyait de surcroît sur le contrat (très mal négocié dès le départ par la partie malienne) pour alourdir considérablement les compensations à son présumé manque à gagner. «Présumé» car le Comité de régulation de l'eau et de l'électricité (Cree), l'arbitre entre l'Etat et l'électricien, avait fait état d'obstruction d'Edm dans la communication de données propres à éclairer la structure des prix et les charges de la société.
NOMINATION A L'INTERNE
Malgré des communiqués de presse rassurants, les négociations conduites sous l'égide d'une Banque mondiale consciente des effets dévastateurs d'une énergie onéreuse sur le développement, ne rapprochaient pas d'un accord acceptable pour tous. D'autant que divers cessions et rachats sur le marché international, introduisaient de nouveaux paramètres dans les projets de Saur qui décidait, finalement, de se retirer. «Les enjeux du changement sont énormes, explique notre interlocuteur à Edm. Il faut d'abord maintenir le climat de confiance qui a prévalu entre la société et ses clients, ces dernières années». Le cap de développement atteint aujourd'hui doit être maintenu et amélioré, souhaite-t-il. Ce changement dans la composition de l'actionnariat intervient au moment où Edm Sa. doit faire face à un certain nombre de défis. Il y a d'abord la satisfaction de la demande pressante et de l'entretien du réseau illustrés par les coupures d'électricité de ces jours derniers. La société doit relever le défi du sommet Afrique-France que la capitale malienne abrite en décembre prochain et surtout se préparer à affronter le pic de la saison chaude.
La consommation d'eau est au maximum à cette période de l'année alors que les capacités sont déjà exploitées au maximum (ou presque) à Bamako. L'installation d'une station de pompage sur la rive droite est réclamée depuis des années pour sécuriser l'approvisionnement de cette partie de la capitale. Outre son coût élevé, l'installation demande du temps pour être fonctionnelle alors qu'à peine 6 mois nous séparent de la canicule.
Sékou Alpha Djiteye, le nouveau directeur général, est au fait de tous ces dossiers pour avoir dirigé le secteur de l'eau à Edm et pour bien connaître l'entreprise. Sa nomination à l'interne, illustre la volonté des actionnaires (de l'Etat au premier chef) de s'appuyer sur une compétence reconnue et une expérience avérée pour bâtir une entreprise fiable. Pour poursuivre le projet entrepris, «il faut l'engagement des hommes et la mobilisation des moyens financiers nécessaires», résume notre interlocuteur à Edm.
D'importantes ressources nécessaires, il en sera certainement question lors de la session du conseil d'administration prévue dans les prochains jours. Cette session désignera les membres du conseil d'administration et le Pca. Ces administrateurs superviseront une période transitoire de six mois qui a déjà prit effet. Une transition qui sera mise à profit pour jeter les bases d'un nouveau départ pour l'entreprise.]url:http://fr.allafrica.com/stories/200511010431.html
C.A. DIA
Kinshasa
Après le retrait du groupe Saur international, l'Etat malien redevient l'actionnaire majoritaire avec 66 % des parts du capital. Dès lors, on attend de changement dans le fonctionnement de l'entreprise. Ce changement dans la composition de l'actionnariat intervient au moment où Edm Sa. doit faire face à un certain nombre de défis, notamment la satisfaction de la demande pressante et de l'entretien du réseau illustrés par les coupures d'électricité ces derniers temps.
C'est une nouvelle page qui vient de s'ouvrir dans la vie de la société Energie du Mali. Le groupe Saur International, filiale de l'entreprise Bouygues, a décidé de se retirer du capital de la société. La décision a été entérinée par un Conseil d'administration de l'entreprise tenu vendredi dernier. Du coup, l'Etat redevient actionnaire majoritaire d'Edm. Ce qui implique naturellement un changement dans le schéma de fonctionnement de l'entreprise. Avec son nouveau statut, l'Etat récupère le droit de nommer le directeur général de la société. Il n'a pas tardé à l'exercer et a pioché à l'interne pour porter à la tête de l'entreprise Sékou Alpha Djiteye, l'ancien directeur national de l'eau.
BASCULEMENT DE L'ACTIONNARIAT
Cinq ans après la mise en concession de la société, le partenaire stratégique, Saur international vient donc de jeter l'éponge pour, dit-on, au niveau de la société, «une différence de vision économique». «Il ne s'agit pas d'un changement dans la forme du contrat de concession, mais tout simplement d'un changement d'actionnariat», explique un responsable de la société.
Rappelons que la concession donnait la majorité des actions au partenaire stratégique que formaient Saur International et Industrial Promotion Services pour l'Afrique de l'ouest du groupe Aga Khan, avec 60%. L'Etat était minoritaire avec 40%. En décidant de se retirer du contrat, Saur International a rétrocédé sa part de 39% des actions à Ips. Ce dernier a à son tour passé le paquet à l'Etat qui se retrouve désormais avec 66% des actions contre 34% pour Ips, l'actionnaire minoritaire.
Ce basculement de l'actionnariat impose une modification de la composition du conseil d'administration. C'est, en effet, le principal actionnaire qui nomme 4 des 6 membres du conseil d'administration. Les administrateurs, à leur tour, élisent un président. Pour le moment, on en est pas encore là. L'heure est plutôt aux interprétations sur les raisons du retrait de Saur. De sources proches de la société, on indique qu'il s'agit d'une différence de vision et d'approche économique. «Après quelques années d'exploitation, le groupe n'a pas trouvé intéressant le marché malien qui ne représente même pas 1% de son chiffre d'affaire», dit-on.
Mais la pression du gouvernement pour la baisse des tarifs d'eau et d'électricité n'est certainement pas étrangère à la décision de Saur. Les négociations qui étaient en cours depuis de longs mois à Washington sous la médiation de la Banque mondiale n'auront donc pas abouti. Pourtant, officiellement, le passage de la concession à l'affermage semblait acquis. Si la concession imposait à Saur la charge des importants investissements que le développement de l'électrification du pays nécessite (une part du contrat que le concessionnaire est loin d'avoir rempli), l'affermage reporte le plus gros de ces investissements sur l'État, en tablant sur la capacité de celui-ci de pouvoir lever des fonds à des conditions plus douces que celles du marché.
Cet accord de principe n'a malheureusement pas épuisé un contentieux alourdi par de profonds désaccords sur la structure du prix du courant électrique. La question est d'importance dans un contexte économique et social qui presse les pouvoirs publics de faire baisser la facture d'électricité autant des particuliers que des entreprises. Saur ne voulait pas en entendre parler, arguant du surcoût engendré par la production thermique de l'électricité alimentant de nombreuses villes du pays. Le concessionnaire s'appuyait de surcroît sur le contrat (très mal négocié dès le départ par la partie malienne) pour alourdir considérablement les compensations à son présumé manque à gagner. «Présumé» car le Comité de régulation de l'eau et de l'électricité (Cree), l'arbitre entre l'Etat et l'électricien, avait fait état d'obstruction d'Edm dans la communication de données propres à éclairer la structure des prix et les charges de la société.
NOMINATION A L'INTERNE
Malgré des communiqués de presse rassurants, les négociations conduites sous l'égide d'une Banque mondiale consciente des effets dévastateurs d'une énergie onéreuse sur le développement, ne rapprochaient pas d'un accord acceptable pour tous. D'autant que divers cessions et rachats sur le marché international, introduisaient de nouveaux paramètres dans les projets de Saur qui décidait, finalement, de se retirer. «Les enjeux du changement sont énormes, explique notre interlocuteur à Edm. Il faut d'abord maintenir le climat de confiance qui a prévalu entre la société et ses clients, ces dernières années». Le cap de développement atteint aujourd'hui doit être maintenu et amélioré, souhaite-t-il. Ce changement dans la composition de l'actionnariat intervient au moment où Edm Sa. doit faire face à un certain nombre de défis. Il y a d'abord la satisfaction de la demande pressante et de l'entretien du réseau illustrés par les coupures d'électricité de ces jours derniers. La société doit relever le défi du sommet Afrique-France que la capitale malienne abrite en décembre prochain et surtout se préparer à affronter le pic de la saison chaude.
La consommation d'eau est au maximum à cette période de l'année alors que les capacités sont déjà exploitées au maximum (ou presque) à Bamako. L'installation d'une station de pompage sur la rive droite est réclamée depuis des années pour sécuriser l'approvisionnement de cette partie de la capitale. Outre son coût élevé, l'installation demande du temps pour être fonctionnelle alors qu'à peine 6 mois nous séparent de la canicule.
Sékou Alpha Djiteye, le nouveau directeur général, est au fait de tous ces dossiers pour avoir dirigé le secteur de l'eau à Edm et pour bien connaître l'entreprise. Sa nomination à l'interne, illustre la volonté des actionnaires (de l'Etat au premier chef) de s'appuyer sur une compétence reconnue et une expérience avérée pour bâtir une entreprise fiable. Pour poursuivre le projet entrepris, «il faut l'engagement des hommes et la mobilisation des moyens financiers nécessaires», résume notre interlocuteur à Edm.
D'importantes ressources nécessaires, il en sera certainement question lors de la session du conseil d'administration prévue dans les prochains jours. Cette session désignera les membres du conseil d'administration et le Pca. Ces administrateurs superviseront une période transitoire de six mois qui a déjà prit effet. Une transition qui sera mise à profit pour jeter les bases d'un nouveau départ pour l'entreprise.]url:http://fr.allafrica.com/stories/200511010431.html