
Jahiliya, Yémen
De Robert F. WORTH
«Chaque année, nous avons dû forer toujours plus profondément pour trouver de l'eau."
A travers le Yémen, les sources d'eau souterraines qui alimentent 24 millions de personnes s'épuisent, et certaines zones pourraient être asséchées en seulement quelques années. C'est une crise qui menace la survie même de cette région aride, dans un pays surpeuplé, et qui pourrait s'avérer plus redoutable que la résurgence d'Al-Qaïda bien connue ici.
La pénurie d'eau frappe une grande partie du Moyen-Orient, mais la pauvreté du Yémen et l'anarchie qui y règne rend le problème encore plus grave et plus difficile à aborder, d’après les experts. Le gouvernement fournit maintenant l'eau une fois tous les 45 jours dans certaines zones urbaines, et dans une grande partie du pays, il n'y a pas du tout d'approvisionnement public en eau. Pendant ce temps, le prix du marché de l'eau a quadruplé au cours des quatre dernières années, poussant de plus en plus à forer illégalement et provoquant la régression rapide des aquifères.
"C’est une catastrophe qui aura des effets sociaux, économiques et environnementaux», pour Abdul Rahman al-Eryani, ministre yéménite de l'eau et de l'environnement. «Nous atteignons un point où nous ne savons même pas si les interventions que nous proposons permettront de sauver la situation."
Pour compliquer la situation et la rendre encore plus sérieuse, la prolifération des arbres qat ont remplacé d'autres cultures dans une grande partie du pays, accaparant une immense partie de l’eau et dans des proportions toujours croissantes, selon des études réalisées par la Banque mondiale. Le gouvernement a lutté pour limiter le forage par les agriculteurs qui cultivent le qat, mais sans effet. L'État a peu d'autorité en dehors de la capitale, Sanaa.
De Robert F. WORTH
«Chaque année, nous avons dû forer toujours plus profondément pour trouver de l'eau."
A travers le Yémen, les sources d'eau souterraines qui alimentent 24 millions de personnes s'épuisent, et certaines zones pourraient être asséchées en seulement quelques années. C'est une crise qui menace la survie même de cette région aride, dans un pays surpeuplé, et qui pourrait s'avérer plus redoutable que la résurgence d'Al-Qaïda bien connue ici.
La pénurie d'eau frappe une grande partie du Moyen-Orient, mais la pauvreté du Yémen et l'anarchie qui y règne rend le problème encore plus grave et plus difficile à aborder, d’après les experts. Le gouvernement fournit maintenant l'eau une fois tous les 45 jours dans certaines zones urbaines, et dans une grande partie du pays, il n'y a pas du tout d'approvisionnement public en eau. Pendant ce temps, le prix du marché de l'eau a quadruplé au cours des quatre dernières années, poussant de plus en plus à forer illégalement et provoquant la régression rapide des aquifères.
"C’est une catastrophe qui aura des effets sociaux, économiques et environnementaux», pour Abdul Rahman al-Eryani, ministre yéménite de l'eau et de l'environnement. «Nous atteignons un point où nous ne savons même pas si les interventions que nous proposons permettront de sauver la situation."
Pour compliquer la situation et la rendre encore plus sérieuse, la prolifération des arbres qat ont remplacé d'autres cultures dans une grande partie du pays, accaparant une immense partie de l’eau et dans des proportions toujours croissantes, selon des études réalisées par la Banque mondiale. Le gouvernement a lutté pour limiter le forage par les agriculteurs qui cultivent le qat, mais sans effet. L'État a peu d'autorité en dehors de la capitale, Sanaa.

Selon M. Eryani, le manque d'eau alimente déjà les conflits tribaux et les insurrections. Ces conflits, y compris un élargissement de la rébellion armée dans le nord et un mouvement séparatiste violent dans le sud, vont rendre encore plus difficile une solution organisée de cette crise de l'eau. De nombreuses régions du pays sont trop dangereuses pour les ingénieurs du gouvernement ou les hydrologues pour qu’ils s’y 'aventurent.
Le changement climatique accentue le problème car les pluies saisonnières sont moins fiables et les températures moyennes augmentent considérablement dans certaines régions, déplore Jochen Renger, un spécialiste des ressources en eau, une assistance technique du gouvernement allemand, qui a conseillé le ministère de l'eau pendant cinq ans.
Contrairement à certains autres pays arides de la région, comme l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, le Yémen n'a pas les moyens d'investir massivement dans les usines de dessalement. Même le traitement des eaux usées a été difficile au Yémen. Les systèmes d'asssainissement ont été mal gérés, et certains membres des institutions religieuses ont déclaré que la réutilisation des eaux usées constituait une violation des principes islamiques.
Pour les experts, la crise de l'eau a ses origines - comme pour la plupart des problèmes qui affectent le Moyen-Orient - dans la croissance rapide de sa population. Le nombre de Yéménites a quadruplé au cours des cinquante dernières années et devrait encore tripler dans les 40 prochaines années, pour atteindre environ les 60 millions d’habitants.
Dans les zones rurales, on peut souvent voir des gens récupérer de l'eau, pour leur consommation, dans des citernes troubles et stagnantes où les animaux s’abreuvent. Même dans les quartiers de Sana, de nombreux pauvres recueillent les eaux de ruissellement provenant de puits privés locaux que leurs voisins plus riches paient l'équivalent de 10 $ pour un camion de 3000 litres d'eau.
"Au moins 1.000 personnes dépendent de cette ressource, affirme Hassan Yahya al-Khayari, 38 ans, alors qu'il regarde couler l'eau du tube en caoutchouc noir d’un camion-citerne à proximité de son domicile à Sana. "Mais le nombre de personnes est en hausse, et il y a de moins en moins d'eau."
Depuis des millénaires, le Yémen a un usage prudent de l'eau grâce à des techniques traditionnelles. Les agriculteurs dépendaient surtout de la récupération des eaux pluviales et des puits peu profonds. Dans certaines régions, ils ont construit des barrages,comme le grand barrage de Marib dans le nord du Yémen, qui a résisté plus de 1000 ans avant de s'effondrer, au VIe siècle après JC.
Mais l'agriculture traditionnelle a commencé à se désagréger dans les années 1960. Après que le Yémen a été submergé de semences étrangères bon marché, beaucoup d'agriculteurs ont connu la faillite. Le Qat a commencé à remplacer les cultures vivrières, et dans la fin des années 1960, les foreuses à moteur ont commencé à proliférer, permettant aux agriculteurs et aux villageois de pomper l'eau des aquifères souterrains beaucoup plus vite qu'elle ne pouvait être renouvelée par des processus naturels. Le nombre de forages n'a fait qu’augmenter dès qu'ils ont été interdits en 2002.
Malgré les effets destructeurs de la culture du qat, le gouvernement yéménite la soutient, au moyen de subventions diesel, de prêts et d’exonérations douanières, comme le souligne M. Eryani. D’ailleurs il est illégal d'importer du qat et de puissants producteurs, connus ici comme la mafia "qat", ont menacé d'abattre tout avion qui apporterait, à meilleur marché, le qat de l'étranger.
Pourtant M. Renger assure que la crise de l'eau pourrait être considérablement réduite par un retour à la collecte des eaux de pluie et à une meilleure gestion. Entre 20 et 30 % de l’eau du Yémen est perdue,gaspillée dit-il, contre 7 à 9 % en Europe.
A Jahiliya et dans d'autres zones autour de la capitale, la Banque mondiale dirige un projet visant à modifier les schémas d'irrigation.
M. Amer, l'agriculteur basé ici, a fièrement montré aux visiteurs ses efforts pour irriguer les champs de tomates et de fruits en utilisant des tubes de caoutchouc, au lieu du simple entonnoir qui alimente des fossés en terre où la plupart de l'eau s’évapore inutilisée. Des tuyaux d'arrosage humecte la terre des cultures au lieu de la gaspiller en la déversant.
Mais il a également fait état de deux puits locaux où l'eau diminue à un rythme effarant de près de 60 mètres par an. A proximité, des fissures dans le sol aride de sa propriété augmentent et sont plus longues et plus profondes chaque année.
«Nous avons souffert pendant des années de ça, dit-il, montrant du doigt une décharge d’instruments de forage qui ont rendu l’âme après être descendus trop profondément dans la terre.
Les ingénieurs yéménites travaillant sur le projet de la Banque mondiale reconnaissent avoir eu d’énormes difficultés à convaincre d'autres fermiers - et même les agences gouvernementales - à prendre leurs efforts au sérieux.
"Il n'y a pas de coordination avec d'autres ministères du gouvernement, même après leur avoir expliqué les dangers », a déclaré Ali Hassan Awad. "Les procureurs ne comprennent pas que le forage soit un grave problème».
M. Eryani, lui, le ministre de l'eau, prend le problème au long terme. Le Yémen a subi des crises écologiques auparavant et y a survécu. L'effondrement du barrage de Marib, par exemple, a conduit à une famine qui a poussé un grand nombre de personnes à migrer à l'étranger, et leurs descendants sont aujourd'hui dispersés à travers le Moyen-Orient.
"Mais c'était avant que les frontières nationales ne soit établies", a ajouté M. Eryani. «Si nous sommes confrontés à une catastrophe semblable maintenant, qui va nous permettre de déménager?"
Pour en savoir plus :
le site de l'ambassade de France au Yemen
Le changement climatique accentue le problème car les pluies saisonnières sont moins fiables et les températures moyennes augmentent considérablement dans certaines régions, déplore Jochen Renger, un spécialiste des ressources en eau, une assistance technique du gouvernement allemand, qui a conseillé le ministère de l'eau pendant cinq ans.
Contrairement à certains autres pays arides de la région, comme l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, le Yémen n'a pas les moyens d'investir massivement dans les usines de dessalement. Même le traitement des eaux usées a été difficile au Yémen. Les systèmes d'asssainissement ont été mal gérés, et certains membres des institutions religieuses ont déclaré que la réutilisation des eaux usées constituait une violation des principes islamiques.
Pour les experts, la crise de l'eau a ses origines - comme pour la plupart des problèmes qui affectent le Moyen-Orient - dans la croissance rapide de sa population. Le nombre de Yéménites a quadruplé au cours des cinquante dernières années et devrait encore tripler dans les 40 prochaines années, pour atteindre environ les 60 millions d’habitants.
Dans les zones rurales, on peut souvent voir des gens récupérer de l'eau, pour leur consommation, dans des citernes troubles et stagnantes où les animaux s’abreuvent. Même dans les quartiers de Sana, de nombreux pauvres recueillent les eaux de ruissellement provenant de puits privés locaux que leurs voisins plus riches paient l'équivalent de 10 $ pour un camion de 3000 litres d'eau.
"Au moins 1.000 personnes dépendent de cette ressource, affirme Hassan Yahya al-Khayari, 38 ans, alors qu'il regarde couler l'eau du tube en caoutchouc noir d’un camion-citerne à proximité de son domicile à Sana. "Mais le nombre de personnes est en hausse, et il y a de moins en moins d'eau."
Depuis des millénaires, le Yémen a un usage prudent de l'eau grâce à des techniques traditionnelles. Les agriculteurs dépendaient surtout de la récupération des eaux pluviales et des puits peu profonds. Dans certaines régions, ils ont construit des barrages,comme le grand barrage de Marib dans le nord du Yémen, qui a résisté plus de 1000 ans avant de s'effondrer, au VIe siècle après JC.
Mais l'agriculture traditionnelle a commencé à se désagréger dans les années 1960. Après que le Yémen a été submergé de semences étrangères bon marché, beaucoup d'agriculteurs ont connu la faillite. Le Qat a commencé à remplacer les cultures vivrières, et dans la fin des années 1960, les foreuses à moteur ont commencé à proliférer, permettant aux agriculteurs et aux villageois de pomper l'eau des aquifères souterrains beaucoup plus vite qu'elle ne pouvait être renouvelée par des processus naturels. Le nombre de forages n'a fait qu’augmenter dès qu'ils ont été interdits en 2002.
Malgré les effets destructeurs de la culture du qat, le gouvernement yéménite la soutient, au moyen de subventions diesel, de prêts et d’exonérations douanières, comme le souligne M. Eryani. D’ailleurs il est illégal d'importer du qat et de puissants producteurs, connus ici comme la mafia "qat", ont menacé d'abattre tout avion qui apporterait, à meilleur marché, le qat de l'étranger.
Pourtant M. Renger assure que la crise de l'eau pourrait être considérablement réduite par un retour à la collecte des eaux de pluie et à une meilleure gestion. Entre 20 et 30 % de l’eau du Yémen est perdue,gaspillée dit-il, contre 7 à 9 % en Europe.
A Jahiliya et dans d'autres zones autour de la capitale, la Banque mondiale dirige un projet visant à modifier les schémas d'irrigation.
M. Amer, l'agriculteur basé ici, a fièrement montré aux visiteurs ses efforts pour irriguer les champs de tomates et de fruits en utilisant des tubes de caoutchouc, au lieu du simple entonnoir qui alimente des fossés en terre où la plupart de l'eau s’évapore inutilisée. Des tuyaux d'arrosage humecte la terre des cultures au lieu de la gaspiller en la déversant.
Mais il a également fait état de deux puits locaux où l'eau diminue à un rythme effarant de près de 60 mètres par an. A proximité, des fissures dans le sol aride de sa propriété augmentent et sont plus longues et plus profondes chaque année.
«Nous avons souffert pendant des années de ça, dit-il, montrant du doigt une décharge d’instruments de forage qui ont rendu l’âme après être descendus trop profondément dans la terre.
Les ingénieurs yéménites travaillant sur le projet de la Banque mondiale reconnaissent avoir eu d’énormes difficultés à convaincre d'autres fermiers - et même les agences gouvernementales - à prendre leurs efforts au sérieux.
"Il n'y a pas de coordination avec d'autres ministères du gouvernement, même après leur avoir expliqué les dangers », a déclaré Ali Hassan Awad. "Les procureurs ne comprennent pas que le forage soit un grave problème».
M. Eryani, lui, le ministre de l'eau, prend le problème au long terme. Le Yémen a subi des crises écologiques auparavant et y a survécu. L'effondrement du barrage de Marib, par exemple, a conduit à une famine qui a poussé un grand nombre de personnes à migrer à l'étranger, et leurs descendants sont aujourd'hui dispersés à travers le Moyen-Orient.
"Mais c'était avant que les frontières nationales ne soit établies", a ajouté M. Eryani. «Si nous sommes confrontés à une catastrophe semblable maintenant, qui va nous permettre de déménager?"
Pour en savoir plus :
le site de l'ambassade de France au Yemen
Thirsty Plant Dries Out Yemen

Dr. Abdul-Rahman al-Eryani with representatives from SDF and GTZ climb one of the reservoirs to inspect it
By ROBERT F. WORTH
JAHILIYA, Yemen — More than half of this country’s scarce water is used to feed an addiction.
Even as drought kills off Yemen’s crops, farmers in villages like this one are turning increasingly to a thirsty plant called qat, the leaves of which are chewed every day by most Yemeni men (and some women) for their mild narcotic effect. The farmers have little choice: qat is the only way to make a profit.
Meanwhile, the water wells are running dry, and deep, ominous cracks have begun opening in the parched earth, some of them hundreds of yards long.
“They tell us it’s because the water table is sinking so fast,” said Muhammad Hamoud Amer, a worn-looking farmer who has lost two-thirds of his peach trees to drought in the past two years. “Every year we have to drill deeper and deeper to get water.”
Across Yemen, the underground water sources that sustain 24 million people are running out, and some areas could be depleted in just a few years. It is a crisis that threatens the very survival of this arid, overpopulated country, and one that could prove deadlier than the better known resurgence of Al Qaeda here.
Water scarcity afflicts much of the Middle East, but Yemen’s poverty and lawlessness make the problem more serious and harder to address, experts say. The government now supplies water once every 45 days in some urban areas, and in much of the country there is no public water supply at all. Meanwhile, the market price of water has quadrupled in the past four years, pushing more and more people to drill illegally into rapidly receding aquifers.
“It is a collapse with social, economic and environmental aspects,” said Abdul Rahman al-Eryani, Yemen’s minister of water and environment. “We are reaching a point where we don’t even know if the interventions we are proposing will save the situation.”
Making matters far worse is the proliferation of qat trees, which have replaced other crops across much of the country, taking up a vast and growing share of water, according to studies by the World Bank. The government has struggled to limit drilling by qat farmers, but to no effect. The state has little authority outside the capital, Sana.
Already, the lack of water is fueling tribal conflicts and insurgencies, Mr. Eryani said. Those conflicts, including a widening armed rebellion in the north and a violent separatist movement in the south, in turn make it more difficult to address the water crisis in an organized way. Many parts of the country are too dangerous for government engineers or hydrologists to venture into.
Climate change is deepening the problem, making seasonal rains less reliable and driving up average temperatures in some areas, said Jochen Renger, a water resources specialist with the German government’s technical assistance arm, who has been advising the water ministry for five years.
Unlike some other arid countries in the region, like Saudi Arabia and the United Arab Emirates, Yemen lacks the money to invest heavily in desalination plants. Even wastewater treatment has proved difficult in Yemen. The plants have been managed poorly, and some clerics have declared the reuse of wastewater to be a violation of Islamic principles.
At the root of the water crisis — as with so many of the ills affecting the Middle East — is rapid population growth, experts say. The number of Yemenis has quadrupled in the last half century, and is expected to triple again in the next 40 years, to about 60 million.
In rural areas, people can often be seen gathering drinking water from cloudy, stagnant cisterns where animals drink. Even in parts of Sana, the poor cluster to gather runoff from privately owned local wells as their wealthier neighbors pay the equivalent of $10 for a 3,000 liter-truckload of water.
“At least 1,000 people depend on this well,” said Hassan Yahya al-Khayari, 38, as he stood watching water pour from a black rubber tube into a tanker truck near his home in Sana. “But the number of people is rising, and the water is growing less and less.”
For millenniums, Yemen preserved traditions of careful water use. Farmers depended mostly on rainwater collection and shallow wells. In some areas they built dams, including the great Marib dam in northern Yemen, which lasted for more than 1,000 years until it collapsed in the sixth century A.D.
But traditional agriculture began to fall apart in the 1960s after Yemen was flooded with cheap foreign grain, which put many farmers out of business. Qat began replacing food crops, and in the late 1960s, motorized drills began to proliferate, allowing farmers and villagers to pump water from underground aquifers much faster than it could be replaced through natural processes. The number of drills has only grown since they were outlawed in 2002.
Despite the destructive effects of qat, the Yemeni government supports it, through diesel subsidies, loans and customs exemptions, Mr. Eryani said. It is illegal to import qat, and powerful growers known here as the “qat mafia” have threatened to shoot down any planes bringing in cheaper qat from abroad.
Still, the water crisis could be eased substantially through a return to rainwater collection and better management, Mr. Renger said. Between 20 and 30 percent of Yemen’s water is lost through waste, he said, compared with 7 to 9 percent in Europe.
In Jahiliya and other areas around the capital, the World Bank is leading a project to change wasteful irrigation patterns.
Mr. Amer, the farmer based here, proudly showed visitors his efforts to irrigate fruit and tomato fields using rubber tubes, instead of just funneling it through earthen ditches that allow most of the water to evaporate unused. Little hoses spray the crops with water instead of wastefully soaking them.
But he also pointed out two local wells where the water is dropping at the astonishing rate of almost 60 feet a year, causing the land to subside. Nearby, sinkholes in the arid soil of his property are growing longer and deeper every year.
“We have been suffering for years from this,” he said, gesturing at a cast-off drill rig that broke after going down too deep into the earth.
The Yemeni engineers working on the World Bank project concede they have had tremendous difficulty convincing other farmers — and even government agencies — to take their efforts seriously.
“There is no coordination with other parts of the government, even after we explain the dangers,” said Ali Hassan Awad. “Prosecutors don’t understand that drilling is a serious problem.”
Mr. Eryani, the water minister, takes the long view. Yemen has suffered ecological crises before and survived. The collapse of the Marib dam, for instance, led to a famine that pushed vast numbers of people to migrate abroad, and their descendants are now scattered across the Middle East.
“But that was before national borders were established,” Mr. Eryani added. “If we face a similar catastrophe now, who will allow us to move?”
Dr. Abdul-Rahman al-Eryani with representatives from SDF and GTZ climb one of the reservoirs to inspect it [
JAHILIYA, Yemen — More than half of this country’s scarce water is used to feed an addiction.
Even as drought kills off Yemen’s crops, farmers in villages like this one are turning increasingly to a thirsty plant called qat, the leaves of which are chewed every day by most Yemeni men (and some women) for their mild narcotic effect. The farmers have little choice: qat is the only way to make a profit.
Meanwhile, the water wells are running dry, and deep, ominous cracks have begun opening in the parched earth, some of them hundreds of yards long.
“They tell us it’s because the water table is sinking so fast,” said Muhammad Hamoud Amer, a worn-looking farmer who has lost two-thirds of his peach trees to drought in the past two years. “Every year we have to drill deeper and deeper to get water.”
Across Yemen, the underground water sources that sustain 24 million people are running out, and some areas could be depleted in just a few years. It is a crisis that threatens the very survival of this arid, overpopulated country, and one that could prove deadlier than the better known resurgence of Al Qaeda here.
Water scarcity afflicts much of the Middle East, but Yemen’s poverty and lawlessness make the problem more serious and harder to address, experts say. The government now supplies water once every 45 days in some urban areas, and in much of the country there is no public water supply at all. Meanwhile, the market price of water has quadrupled in the past four years, pushing more and more people to drill illegally into rapidly receding aquifers.
“It is a collapse with social, economic and environmental aspects,” said Abdul Rahman al-Eryani, Yemen’s minister of water and environment. “We are reaching a point where we don’t even know if the interventions we are proposing will save the situation.”
Making matters far worse is the proliferation of qat trees, which have replaced other crops across much of the country, taking up a vast and growing share of water, according to studies by the World Bank. The government has struggled to limit drilling by qat farmers, but to no effect. The state has little authority outside the capital, Sana.
Already, the lack of water is fueling tribal conflicts and insurgencies, Mr. Eryani said. Those conflicts, including a widening armed rebellion in the north and a violent separatist movement in the south, in turn make it more difficult to address the water crisis in an organized way. Many parts of the country are too dangerous for government engineers or hydrologists to venture into.
Climate change is deepening the problem, making seasonal rains less reliable and driving up average temperatures in some areas, said Jochen Renger, a water resources specialist with the German government’s technical assistance arm, who has been advising the water ministry for five years.
Unlike some other arid countries in the region, like Saudi Arabia and the United Arab Emirates, Yemen lacks the money to invest heavily in desalination plants. Even wastewater treatment has proved difficult in Yemen. The plants have been managed poorly, and some clerics have declared the reuse of wastewater to be a violation of Islamic principles.
At the root of the water crisis — as with so many of the ills affecting the Middle East — is rapid population growth, experts say. The number of Yemenis has quadrupled in the last half century, and is expected to triple again in the next 40 years, to about 60 million.
In rural areas, people can often be seen gathering drinking water from cloudy, stagnant cisterns where animals drink. Even in parts of Sana, the poor cluster to gather runoff from privately owned local wells as their wealthier neighbors pay the equivalent of $10 for a 3,000 liter-truckload of water.
“At least 1,000 people depend on this well,” said Hassan Yahya al-Khayari, 38, as he stood watching water pour from a black rubber tube into a tanker truck near his home in Sana. “But the number of people is rising, and the water is growing less and less.”
For millenniums, Yemen preserved traditions of careful water use. Farmers depended mostly on rainwater collection and shallow wells. In some areas they built dams, including the great Marib dam in northern Yemen, which lasted for more than 1,000 years until it collapsed in the sixth century A.D.
But traditional agriculture began to fall apart in the 1960s after Yemen was flooded with cheap foreign grain, which put many farmers out of business. Qat began replacing food crops, and in the late 1960s, motorized drills began to proliferate, allowing farmers and villagers to pump water from underground aquifers much faster than it could be replaced through natural processes. The number of drills has only grown since they were outlawed in 2002.
Despite the destructive effects of qat, the Yemeni government supports it, through diesel subsidies, loans and customs exemptions, Mr. Eryani said. It is illegal to import qat, and powerful growers known here as the “qat mafia” have threatened to shoot down any planes bringing in cheaper qat from abroad.
Still, the water crisis could be eased substantially through a return to rainwater collection and better management, Mr. Renger said. Between 20 and 30 percent of Yemen’s water is lost through waste, he said, compared with 7 to 9 percent in Europe.
In Jahiliya and other areas around the capital, the World Bank is leading a project to change wasteful irrigation patterns.
Mr. Amer, the farmer based here, proudly showed visitors his efforts to irrigate fruit and tomato fields using rubber tubes, instead of just funneling it through earthen ditches that allow most of the water to evaporate unused. Little hoses spray the crops with water instead of wastefully soaking them.
But he also pointed out two local wells where the water is dropping at the astonishing rate of almost 60 feet a year, causing the land to subside. Nearby, sinkholes in the arid soil of his property are growing longer and deeper every year.
“We have been suffering for years from this,” he said, gesturing at a cast-off drill rig that broke after going down too deep into the earth.
The Yemeni engineers working on the World Bank project concede they have had tremendous difficulty convincing other farmers — and even government agencies — to take their efforts seriously.
“There is no coordination with other parts of the government, even after we explain the dangers,” said Ali Hassan Awad. “Prosecutors don’t understand that drilling is a serious problem.”
Mr. Eryani, the water minister, takes the long view. Yemen has suffered ecological crises before and survived. The collapse of the Marib dam, for instance, led to a famine that pushed vast numbers of people to migrate abroad, and their descendants are now scattered across the Middle East.
“But that was before national borders were established,” Mr. Eryani added. “If we face a similar catastrophe now, who will allow us to move?”
Dr. Abdul-Rahman al-Eryani with representatives from SDF and GTZ climb one of the reservoirs to inspect it [