
LE MONDE
Alors que la France s'apprête à privatiser Gaz de France sous la houlette du groupe Suez, Buenos Aires vient de prendre le chemin exactement contraire : elle a renationalisé son service de l'eau après une expérience douloureuse. Suez en Argentine, c'est fini. Cette relation vieille de treize ans, donnée un temps en exemple au monde entier, s'achève par une rupture et des recours devant les tribunaux. Depuis le printemps, la distribution et le traitement de l'eau potable pour les 11 millions d'habitants du grand Buenos Aires ne sont plus assurés par Aguas Argentinas, filiale du groupe français. Une nouvelle société, Aysa, détenue à 90 % par l'Etat argentin et 10 % par le personnel, a pris le relais.
Cette renationalisation n'est qu'une demi-surprise. Alors que la concession avait été signée en 1993 pour une durée de trente ans, le groupe français avait annoncé, le 9 septembre 2005, son intention de se retirer, au risque d'aggraver une crise qui depuis trois ans empoisonnait les relations entre la France et l'Argentine. "Un déchirement", commentait sobrement le PDG, Gérard Mestrallet. La saga Suez avait pourtant commencé sous d'excellents auspices. Au début des années 1990, le président Carlos Menem, converti au néolibéralisme, avait décidé de privatiser des services publics inefficaces et déficitaires. Les Argentins n'étaient-ils pas victimes de coupures d'eau, d'électricité et de téléphone ? Le marché offert par Buenos Aires était tentant : il s'agissait, disait-on, de la plus grande concession jamais signée dans le monde.
En avril 1993, la Lyonnaise des Eaux l'emportait sur ses concurrents espagnol et britannique. L'aventure n'était pas sans risque. Il s'agissait de gérer un réseau vétuste de 11 000 kilomètres de tuyaux et d'égouts plus ou moins étanches, de faire marcher au maximum de sa capacité une usine construite en 1927 par les Anglais, et surtout de reprendre en main l'administration de l'ancienne compagnie d'Etat, Obras Sanitarias de la Nacion, 7 500 salariés, règne du "laisser-aller, de la gabegie et de la corruption", selon le ministre de l'économie de l'époque, Domingo Cavallo
Alors que la France s'apprête à privatiser Gaz de France sous la houlette du groupe Suez, Buenos Aires vient de prendre le chemin exactement contraire : elle a renationalisé son service de l'eau après une expérience douloureuse. Suez en Argentine, c'est fini. Cette relation vieille de treize ans, donnée un temps en exemple au monde entier, s'achève par une rupture et des recours devant les tribunaux. Depuis le printemps, la distribution et le traitement de l'eau potable pour les 11 millions d'habitants du grand Buenos Aires ne sont plus assurés par Aguas Argentinas, filiale du groupe français. Une nouvelle société, Aysa, détenue à 90 % par l'Etat argentin et 10 % par le personnel, a pris le relais.
Cette renationalisation n'est qu'une demi-surprise. Alors que la concession avait été signée en 1993 pour une durée de trente ans, le groupe français avait annoncé, le 9 septembre 2005, son intention de se retirer, au risque d'aggraver une crise qui depuis trois ans empoisonnait les relations entre la France et l'Argentine. "Un déchirement", commentait sobrement le PDG, Gérard Mestrallet. La saga Suez avait pourtant commencé sous d'excellents auspices. Au début des années 1990, le président Carlos Menem, converti au néolibéralisme, avait décidé de privatiser des services publics inefficaces et déficitaires. Les Argentins n'étaient-ils pas victimes de coupures d'eau, d'électricité et de téléphone ? Le marché offert par Buenos Aires était tentant : il s'agissait, disait-on, de la plus grande concession jamais signée dans le monde.
En avril 1993, la Lyonnaise des Eaux l'emportait sur ses concurrents espagnol et britannique. L'aventure n'était pas sans risque. Il s'agissait de gérer un réseau vétuste de 11 000 kilomètres de tuyaux et d'égouts plus ou moins étanches, de faire marcher au maximum de sa capacité une usine construite en 1927 par les Anglais, et surtout de reprendre en main l'administration de l'ancienne compagnie d'Etat, Obras Sanitarias de la Nacion, 7 500 salariés, règne du "laisser-aller, de la gabegie et de la corruption", selon le ministre de l'économie de l'époque, Domingo Cavallo